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Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 1, 1788.djvu/414

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Les quatre.

de pinceau ou de burin, les pièces achevées qui forcent des mains de sa maîtresse. Elle, lui permet seulement de les enchâsser dans quelques ornemens détachés, de tracer autour d’eux quelques dessins de draperie ? mais elle lui défend de toucher à la figure principale. C’est ainsi que la nature fait l’homme, tandis que l’art décide & dispose des habillemens, & des différentes manieres de les assortir.

Si parmi les ouvrages de l’art il s’en trouve qui paroissent doués d’une beauté & d’une noblesse particuliere, un peu d’attention nous fera reconnoître qu’ils sont redevables de ces prérogatives à la force de la nature, à ses heureuses influences. La verve des poëtes, cette fureur qui les anime, ce feu divin qui les inspire, sont l’unique source de tout ce que nous admirons dans leurs vers. Le plus grand génie, s’il n’est pas né poëte, ne sauroit le devenir, ou si la nature, dont les faveurs sont journalieres, l’abandonne, il pose la lyre, & ne se flatte point de pouvoir suppléer, avec le secours des regles, à cet enthousiasme qui est l’unique