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Page:Huysmans - Certains, 1908.djvu/30

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CERTAINS

jours nue des déesses, cette chair dont la plus inexorable formule figure dans un tableau de Régnault, au musée Lacaze, un tableau où l’une des trois Grâces arbore un fessier de percale rose et huilé, éclairé en dedans par une veilleuse, mais c’est de la chair déshabillée, réelle, vive, de la chair saisie par les ablutions et dont la froide grenaille va s’amortir.

Parmi les gens qui visitaient cette exposition, d’aucuns, en présence de celle de ces femmes qui est vue, accroupie, de face, et dont le ventre s’exonère des habituelles fraudes, s’écriaient, indignés par cette franchise, poignés quand même par la vie émanée de ces pastels. En fin de compte, ils échangeaient quelques réflexions honteuses ou dégoûtées, lâchaient au départ le grand mot : c’est obscène !

Ah ! si jamais œuvres le furent peu ; si jamais œuvres furent, sans précautions dilatoires et sans ruses, pleinement, décisivement chastes, ce sont bien celles-ci ! — Elles glorifient même le dédain de la chair, comme jamais, depuis le moyen âge, artiste ne l’avait osé !

Et cela va même plus loin, car ce n’est pas un dédain révisable d’homme, c’est bien plutôt