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Page:Huysmans - Certains, 1908.djvu/36

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CERTAINS

dessinant un A renversé sur sa pointe avec leurs pieds réunis et arcs-boutés sur le sol, leurs corps renversés en arrière, écartés à droite et à gauche comme les deux jambages de la lettre et reliés au milieu par la barre des bras, deux bambines, les mains enlacées, se préparent à pivoter éperdûment sur place.

D’autres, enfin, grimpent sur des bancs pour une partie de chat-perché, et, dans l’ombre du hangar, passe la silencieuse silhouette d’une méditante soeur.

Ce qu’il faut tout d’abord relever, c’est l’observation précise du peintre. Ces enfants sont saisies, piquées sur la toile, sans tricheries ni dols. À ce point de vue, les fillettes, qui tendent encore la main à leur camarade si naturellement courbée sur sa chaussure, sont décisives ; — puis, prenez chacune d’elles à part et voyez combien les tempéraments s’accusent. — Ici, une petite, maigriotte, pauvre de sang, intéressante par sa mine fûtée, anoblie presque par sa chétivité et sa pâleur ; là, une autre plus membrue, plus mastoque, plus tachée de sons ; là encore, une autre dont la figure est déjà faite : son visage de trente ans est prêt ; plusieurs sont dans ce