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Page:Huysmans - Certains, 1908.djvu/60

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CERTAINS

À citer entre toutes aussi, une petite affiche qui servait d’annonce aux Folies-Bergère et portait ce titre : « la Musique de l’Avenir par les Bozza. »

Celle-là était, dans son genre, une vraie merveille ; elle mettait en scène une cascade de clowns habillés de tenues bizarres. En bas, un marmiton, bouleversé par un rire qui lui fendait la face et lui pochait un œil, donnait des coups de pieds dans le vide et sonnait avec ses casseroles de la cymbale ; un peu plus haut, une sorte de Yankee flottant dans un pantalon à pattes d’éléphant et dans une veste à damier, blanche et verte, avançait un museau de singe et jouait comme du flageolet, bouchant avec ses doigts de fictifs trous, suçant, ainsi qu’une idéale flûte, le bec d’une burette à lampe ; plus haut, encore, un autre gâte-sauce se trémoussait, éperdu, en choquant des casseroles et des pincettes, alors qu’une vieille femme, en bonnet à ruches, à nez retroussé, à bandeaux plats, un galfâtre déguisé en vieille et tenant de la poseuse de sangsues et du fruitier soûl, tournait rageusement la manivelle d’un moulin à café, soutenu dans son vacarme par un margougnat de Grenelle qui battait, avec des assiettes,