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Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/422

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Dans la chapelle de la Vierge, de pauvres femmes étaient prostrées. Il s’était agenouillé, las, abasourdi, l’âme si mal à l’aise, qu’elle somnolait, sans force pour s’éveiller. Des chantres et des gamins de la maîtrise s’étaient installés avec deux ou trois prêtres dans cette chapelle ; on avait allumé des cierges, et une voix blonde et ténue d’enfant avait, dans le noir de l’église, chanté les longues antiennes du Rorate.

Dans l’état d’accablement, de tristesse où il stagnait, Durtal s’était senti ouvert et saigné jusqu’au fond de l’âme, alors que moins tremblante qu’une voix plus âgée qui eût compris le sens des paroles qu’elle disait, cette voix racontait ingénument, presque sans confusion, au Juste : « Peccavimus et facti sumus tanquam immundus nos ».

Et Durtal reprenait ces mots, les épelait, terrifié, pensait : ah oui, nous avons péché et nous sommes semblables au lépreux, Seigneur ! — Et le chant continuait et, à son tour, le Très-Haut empruntait ce même organe innocent de l’enfance, pour confesser à l’homme sa pitié, pour lui confirmer le pardon assuré par la venue du Fils.

Et la soirée s’était terminée par un Salut de plain-chant au milieu de ce silence prosterné de malheureuses femmes.

Durtal se rappelait être sorti de l’église, étayé, renfloué, débarrassé de ses hantises et il était reparti sous la bruine, surpris que le chemin fût aussi court, fredonnant le Rorate dont l’air l’obsédait, finissant par y voir l’attente personnelle d’un inconnu propice.

Et c’étaient d’autres soirs… l’Octave des Morts à