Aller au contenu

Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/443

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vres complètes de saint Thomas, des outils de travail que nous n’employons guère, car, vous le savez, nous sommes un rameau du tronc Bénédictin voué à une vie de labeur corporel et de pénitence ; nous sommes les hommes de peine du bon Dieu, surtout. Ici, c’est M. Bruno qui se sert de ces livres et moi aussi quelquefois, car je suis plus spécialement chargé du spirituel, dans ce monastère, ajouta, en souriant, le moine.

Durtal le regardait ; il maniait avec des mains caressantes, couvait d’un œil tout en lumière bleue, les volumes, riait avec une joie d’enfant en tournant les pages.

Quelle différence entre ce moine qui adorait évidemment les bouquins et ce prieur, au profil impérieux, aux lèvres muettes qui l’avait écouté, le second jour, en confession ! puis, songeant à tous ces trappistes, à la sérénité de leurs visages, à l’allégresse de leurs yeux, Durtal se disait que ces Cisterciens n’étaient nullement, ainsi que le monde croit, des gens douloureux et funèbres, mais qu’ils étaient, bien au contraire, les plus gais des hommes.

— À propos, dit le P. Maximin, le R. P. abbé m’a chargé d’une commission. Sachant que vous voulez nous quitter demain, il serait désireux, maintenant qu’il est sur pied, de passer au moins quelques minutes avec vous. Il sera libre, ce soir. Cela vous gênerait-il de le rejoindre après Complies ?

— Pas du tout, je serai très heureux de causer avec dom Anselme.

— Alors, c’est entendu.

Ils descendirent. Durtal remercia le prieur qui rentra dans la clôture des couloirs et l’oblat qui remonta dans sa