Aller au contenu

Page:Huysmans - Sainte Lydwine de Schiedam (1912).djvu/111

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que sur la croix ; sans doute, son supplice physique fut horrible, mais combien il semble indolore si on le confronte avec l’autre ! car, sur le gibet, ce fut l’assaut de toutes les immondices réunies des temps ; les gémonies du passé, du présent, de l’avenir, se fondirent et se concentrèrent en une sorte d’essence corrosive ignoble et elles l’inondèrent ; ce fut quelque chose comme un charnier des cœurs, comme une peste des âmes qui se ruèrent sur le bois pour l’infecter. — Ah ! ce calice qu’il avait accepté de boire, il empoisonnait l’air ! — Les anges, qui avaient assisté le Seigneur au jardin des Olives, n’intervenaient plus ; ils pleuraient, atterrés, devant cette mort abominable d’un Dieu ; le soleil s’était enfui, la terre bruissait d’épouvante, les rocs terrifiés étaient sur le point de s’ouvrir. Alors Jésus poussa un cri déchirant : Père, pourquoi m’avez-vous abandonné ?

Et il mourut.

Pensez à tout cela, Lydwine, et assurez-vous que vos souffrances sont faibles en face de celles-là ; remémorez-vous les inoubliables scènes du jardin des Olives et du Golgotha, regardez le chef dévasté par les soufflets, le chef ébouriffé d’épines de l’Époux, mettez vos pas dans les empreintes des siens et, à mesure que vous le suivrez, les étapes se feront plus débonnaires, les marches forcées se feront plus douces.

Et le brave homme la quitta, après lui avoir encore promis de revenir. Lydwine fut généreuse ; elle se donna de tout cœur, comme une âme de somme, pour