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Page:Huysmans - Sainte Lydwine de Schiedam (1912).djvu/120

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dans les biographies de saints qui furent les prédécesseurs ou les contemporains de Lydwine ; aussi, arrivèrent-ils, attirés par la curiosité, chez elle et elle fut explorée sans relâche et soumise à une inquisition de tous les instants ; et ses détracteurs ne furent point quatre, tels que les amis de Job, ils furent légion ! La plupart ne regardaient que cette tête fendue, du front au nez, que ce visage craqué comme une grenade, que ce corps dont les chairs en fuite avaient dû être comprimées, ainsi que celles des momies, par des lacis de bandelettes et le dégoût leur venait de tant d’infirmités !

Leur curiosité était déçue. Ils n’avaient découvert que le masque en pièce d’une gorgone, là où ils s’étaient attendus à rencontrer une face plus ou moins avenante qui aurait pu les émouvoir ou une physionomie plus ou moins bizarre dont ils auraient pu se moquer ; ils ne virent que les apparences, ne distinguèrent aucun foyer de lumière sous les vitres en corne de cette lanterne cassée, rangée dans l’ombre, en un coin ; et cependant l’âme rayonnait, embrasée d’amour, car Jésus l’inondait de ses effusions, la dorait de ses lueurs !

Ils se vengèrent de leur désappointement en l’accusant de supercherie. Elle ne gardait nullement la diète ; elle bâfrait lorsqu’elle était seule et buvait, la nuit. Ils la harcelèrent de questions, préparèrent des amorces, tâchèrent de l’amener à se contredire. À tous ces interrogatoires, elle répondait simplement :

— Je ne vous comprends pas ; vous croyez qu’il est impossible de subsister sans le secours d’aucun mets,