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Page:Huysmans - Sainte Lydwine de Schiedam (1912).djvu/230

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même vous ne comprendriez pas un mot des oraisons que vous débitez ; harassez Jésus, répétez-lui sans cesse : aidez-moi à vous aimer ! — Vous vous désolez de ne pas sentir encore l’amour s’irruer en vous ? Eh mais, pleurer parce qu’on n’aime pas, c’est déjà aimer !

Et elle qui parlait de la sorte, ne parvenait pas toujours, elle-même, à se consoler.

Si sainte qu’elle fût, elle n’était pas arrivée au degré de maturité où Dieu la voulait ; Il exigeait d’elle plus qu’il n’eût exigé de toute autre ; sa tâche, dont elle ne mesurait pas l’énormité, nécessitait l’emploi d’exceptionnelles vertus et d’extraordinaires peines ; elle était entre les mains du Christ un contre-poids qu’il utilisait pour contrebalancer les crimes de l’Europe et les désordres de l’Église ; elle était une victime réparatrice des vivants et aussi des morts et l’Époux la pressurait, la décantait, la filtrait jusqu’à sa dernière goutte. Il la lui fallait résolument dépouillée, sans dépendance d’elle-même, seule ; et des sentiments humains qu’il tolérait chez les autres, l’irritaient chez elle.

Il avait admis qu’elle déplorât la mort du vieux Pierre, son père, lorsqu’il trépassa, en un mois de décembre, la veille de la fête de la Conception de la bienheureuse Vierge. Il amortit la pesanteur de ce coup, en la prévenant à l’avance et Lydwine avertit à son tour Jan Walter, en le priant de ne pas aller dire, ce jour-là, la messe à Ouderschie, comme il en avait l’intention, afin de pouvoir assister le vieillard à ses derniers moments.