Aller au contenu

Page:Huysmans - Sainte Lydwine de Schiedam (1912).djvu/235

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

désert veille à ce que je ne manque de rien, répliqua Gérard.

L’évêque crut qu’il ne s’agissait que de nutriments tout spirituels et il lui demanda s’il connaissait une autre créature humaine qui vivait également sans manger.

— Oui, en Hollande, dans une petite ville appelée Schiedam, une vierge fort infirme vit depuis des années à jeun ; cette vierge s’est élevée à un si haut point de perfection qu’elle me précède de très loin ; nous conversons cependant, de longue date, ensemble dans la lumière incréée ; une chose m’étonne, pour l’instant ; depuis quelques jours, elle ne s’évade plus de la terre et je ne perçois plus, en extase, sa présence ; et elle n’est pas morte pourtant !

Je crois deviner néanmoins, poursuivit Gérard, après un silence, qu’elle s’afflige plus qu’il ne conviendrait de la perte de l’un de ses proches ; Dieu le permettant ainsi pour l’humilier ; je pense que c’est à cause de l’intempérance de ses larmes que le Seigneur la prive momentanément de ses grâces ; au reste, lorsque vous retournerez en Europe, si vous passez par les Pays-Bas, allez la voir et posez-lui, de ma part, ces trois questions :

Depuis combien de temps votre ami Gérard s’est-il retiré dans sa thébaïde ?

Quel âge avait-il lorsqu’il adopta ce genre d’existence ?

Pourquoi ne vous rencontre-t-il plus comme autrefois ?