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Page:Ingres d’après une correspondance inédite, éd. d’Agen, 1909.djvu/404

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font foi. Il paraît avoir beaucoup réfléchi sur son art et a su très bien écouter et voir. C’est un très brave jeune homme que j’aime et qui me le rend bien, je crois.

Quant à moi, je ne fais que reprendre les pinceaux. Depuis quatre mois à Paris, je ne fais qu’aménager et clouer dans mon nouvel appartement, — toujours avec une chambre pour l’ami et sa fille, — arranger mes ateliers, être malade et essuyer une révolution qui m’a ébranlé de fond en comble, sans parler des pertes pécuniaires qui dérangeront ce petit bien-être amassé avec tant de peines. Et cela, au moment où nous allions en jouir. Mais passe pour cela ; il y a remède. Je puis encore faire quelque chose ....................

Si la liberté est tout à l’ordre du jour, elle n’est pas pour moi, moi, le plus esclave de tous. Irai-je à Dampierre ? Quand pourrai-je vraiment travailler ? Quels projets peut-on, d’ailleurs, faire dans ces moments d’angoisse où l’on vit au jour le jour, au bord du précipice dont la pente est si rapide, sur le gouffre où l’on est seulement appuyé à la république que tout le monde veut, mais que tant d’anges infernaux feraient rouge quand nous la voudrions, comme Astrée, belle, vierge, noble et pure ? Il n’y a que Dieu qui puisse nous sauver, et nous n’espérons qu’en sa divine Providence,