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Page:Ingres d’après une correspondance inédite, éd. d’Agen, 1909.djvu/532

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lignes trop prosodiquement écrites pour quelques uns pouvait s’allier à l’art des caractères supérieurement conçus et exprimés, on serait presque tenté d’appeler cet impeccable styliste de la forme banale et du fond chrétien le Zola de l’Évangile, dont il nous a déjà raconté, en une suite d’inoubliables tableaux, les Paraboles divines.

Salles IV et IV bis

Ce mystique réaliste qu’est M. Burnand a-t-il cherché, pour la comparaison, ces deux salles voisines où devrait présider et où ne fait qu’exposer cet autre mystique idéal qu’est M. Dagnan-Bouveret à qui l’art français doit de si nobles pages ? Celle de ce Salon n’ajoutera rien à la gloire du maître de la Cène et de la Vierge ; pas même cette espèce de « Chapelle Expiatoire » où les admirateurs trop prématurés de ce jeune maître ont exposé, entre trois ou cinq bons dessins qui rappellent ses plus savoureuses compositions, une soixantaine de notes tout au plus bonnes à consulter intimement dans le secret de l’atelier, et non plus au plein jour du Salon. Il serait permis de croire que de malins amis de M. Dagnan-Bouveret ont pris plaisir à lui faire expier, là, quelque chose. Il n’est pas donné à tout le monde de dessiner comme M. Ingres ; mais, quand on peint comme M. Dagnan-Bouveret, on devrait se tenir pour satisfait d’un nouveau chef-d’œuvre de délicatesse et de recueillement dont il idéalise si souvent de si aristocratiques beautés. Celles de cette année lui auront l’ait défaut. Il ne l’expiera que jusqu’à l’année prochaine, espérons-le.

En occurrence de cette exposition des dessins de M. Dagnan-Bouveret au Salon de la Société Nationale des Beaux-Arts, il ne sera peut-être pas sans intérêt de rappeler une anecdote de la vie artistique d’Ingres, qui n’a pas trouvé place dans le volume que nous permet de publier, aujourd’hui, une correspondance inédite de ce maître.

Les admirateurs d’Ingres, ayant voulu profiter de la solennité de l’Exposition universelle de 1855 où le maître triompha pleinement une fois encore, avaient disposé, en cimaise et en bordure des grands tableaux, une simple rangée de tous petits portraits à la mine de plomb, de ces merveilleuses notes de vie dont ce maître hors pair en réalisme classique avait le secret. À la veille de l’ouverture, Ingres, invité à venir voir la disposition de ses œuvres dans la salle