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Page:Ivoi - Jud Allan, roi des gamins.djvu/359

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Dans une de leurs promenades, ils ont atteint la haie épineuse où ils stationnent en ce moment.

Une brèche existait, pratiquée par quelque bande de rongeurs de la prairie. Ils l’ont franchie.

Et de l’autre côté, dans le jardin, devant la maison peinte en bleu pâle[1], avec ses persiennes d’un vert tendre, sa véranda aux colonnettes graciles, sa balustrade de bois capricieusement ajourée, ils ont vu deux femmes, aux visages inconscients, mais aux mains enlacées avec tendresse, comme si le cœur se trahissait, survivant à l’esprit endormi.

Ces femmes étaient Lilian Allan et la pauvre Lily Pariset, en qui Linérès avait espéré retrouver sa mère !

Un serviteur armé, japonais d’aspect, avait couru sus aux visiteurs. Sous la menace d’un revolver, ceux-ci durent regagner la brèche.

Le lendemain, l’ouverture avait disparu, aveuglée par des cactus épineux si serrés que le passage ne pouvait plus être tenté.

Des factionnaires veillaient maintenant aux angles de la haie.

On ne voulait donc pas qu’ils pussent entretenir les recluses !

Une curiosité allant jusqu’à l’angoisse les avait alors étreints.

Dans une heure d’exaspération impuissante, le marquis s’était écrié :

— Ah ! j’aurais dû demeurer à Washington coûte que coûte. Agir autrement que l’on ne nous y poussait eût été le moyen le plus sûr de savoir.

« Ne croyez pas à une critique de ma part, ma chère Linérès, mais ne regrettez-vous pas de m’avoir écrit ?

— Je vous ai écrit, dites-vous ?… Où ?… Quand ?

Il lui mit sous les yeux le billet qui lui était parvenu à Washington, ce billet remis à Jemkins par la Jolie Chinoise Rouge-Fleur.

Linérès considéra le papier, le retourna en tous sens, avec un effarement grandissant. Enfin, elle murmura cette phrase affolante :

— C’est mon écriture… et, cependant, jamais je n’ai voulu écrire cela.

La lettre était donc fausse…

  1. C’est un usage général, dans le centre et le Sud-Amérique, de badigeonner les maisons de couleurs tendres et variées.