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Page:Ivoi - L’Aéroplane fantôme.djvu/249

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L’AÉROPLANE-FANTÔME

Klausse est à l’avant. Herr Listcheü, Tril et Suzan se tenant par la main, Joé et Ketty assis l’un près de l’autre, sont groupés au centre.

L’aéroplane file à une hauteur vertigineuse.

Dans le flamboiement du soleil qui s’incline vers l’horizon occidental, il est certainement invisible pour les humains errant à la surface du sol.

— Où allons-nous ? murmure Tril.

Le jeune Américain, si confiant en lui-même, semble avoir perdu son aplomb en s’adressant au docteur. Il marque une timidité qui décèle son respect pour l’homme de science dont la volonté dirige l’aéroplane. Mais ce dernier répond avec bonté :

— Loin de Berlin, mon enfant. Devant le déploiement de forces dirigé contre Miss Veuve, — il prononce ce nom avec un sourire —, déploiement que l’administration allemande va certainement exagérer encore après les incidents de cette journée, le mieux sera de disparaître durant quelques jours. Nous y gagnerons un repos nécessaire. Et puis, nous infligerons à nos adversaires une angoisse morale telle qu’à notre première mise en demeure, ils céderont vraisemblablement, et nous livreront le misérable dont l’aveu nous est nécessaire.

— Ce coquin de Von Karch. Ah ! celui-là les tient bien.

— Oui, mais l’opinion publique travaillera pour nous. Songe donc. On nous attendra partout, et on ne nous verra nulle part. Le gouvernement n’osera résister lorsque, après cette période anxieuse, nous manifesterons de nouveau notre existence.

Les adolescents écoutaient, une foi sans bornes brillant en leurs regards. Mais Tril était curieux, Suzan aussi sans doute, car la menotte de la fillette serrait les doigts du gamin, semblant lui communiquer son intense désir de s’instruire.

— Alors, Herr Doktor, à la nuit nous descendrons sur le sol ?

— Oui, sans doute, dans un endroit où l’on ne viendra pas nous chercher.

— Bah ! Moi je descendrais n’importe où. Quand je pense à la danse des gendarmes, je me dis que nous rencontrer est tout à fait dangereux pour les autres, donc…

— Donc, tu oublies que je veux disparaître momentanément. Or, pour disparaître, il ne faut pas être rencontré.

Tril rougit. Mais la main de Suzan se fit plus pressante. Il lança un coup d’œil de côté à sa petite amie, et, comme s’il puisait dans les grands yeux fixés sur lui un regain de courage :