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Page:Ivoi - L’Aéroplane fantôme.djvu/295

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L’AÉROPLANE-FANTÔME

Et dans le couloir sombre, où il se tenait auprès de Margarèthe tremblante, Von Karch, les sourcils froncés, l’obscurité cachant à sa fille l’expression terrible de son visage, murmurait :

— L’Empereur m’a découvert ; il peut donc parer le coup des dossiers, mais alors je suis perdu !

Si habile que soit un fourbe, il y a en lui une faiblesse. Il tient toujours à juger les autre d’après lui-même. Il est trop malin. Dans l’occurrence, il lui semblait évident que l’Empereur ne craignait plus ses révélations puisqu’il l’avait livré. Pas un instant, il ne pouvait lui venir à l’idée que le souverain chevaleresque avait obéi, quoi qu’il en pût advenir, à l’appel de la justice, si chère à toutes les natures de noblesse et de loyauté.

L’espion salua d’un mauvais sourire les espoirs que François exprimait maintenant.

— Huit jours encore de patience. Ma parole me lie, c’est vrai ; mais grâce à l’aéroplane, je vous garantis une surveillance telle que personne ne sortira d’ici. Si le Von Karch, en réclamant ce délai, a eu quelque pensée de fourberie, il ne la réalisera pas. Dans huit jours, Édith, rien ne nous séparera plus.

À ce moment, l’espion empoigna le poignet de Margarèthe. La jeune femme sursauta, eut un léger cri. Elle regarda Von Karch, ombre se découpant vaguement dans l’ombre du couloir.

— Que voulez-vous, mon père ?

— Vous avertir que la demi-heure est écoulée, ma rêveuse Marga, et que nous allons reconduite François de l’Étoile jusqu’au seuil de notre maison.

— Je suis à vos ordres.

Trois minutes après, l’ingénieur franchissait le fossé qui encerclait le blockhaus, traversait la clairière et s’enfonçait sous les arbres du parc, remontant la pente de la colline de Babel (Babelsberg) dans La direction de la Colonne Belvédère où, ainsi qu’il l’avait déclaré, l’attendait son aéroplane sous sa forme terrestre de wagon.

François avait à peine fait dix pas sous le couvert des arbres, que quatre ombres se dressèrent devant lui.

— C’est nous, patron, fit une voix étouffée.

— Tril !

— Oui, avec Suzan, Joé et Ketty.

— Pourquoi ? Je vous avais ordonné de rester à la garde du wagon.