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Page:Ivoi - L’Aéroplane fantôme.djvu/357

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LE LIT DE DIAMANTS.

feriez sagement de regagner votre cabine. Oh ! pour peu de temps, car Herr Von Karch a autorisé Mademoiselle à sortir librement à toute heure. Il souhaite que cette liberté aide à sa guérison complète.

Une joie intense fit battre le cœur d’Édith. Elle allait regagner sa cabine. Elle pourrait déployer le journal mystérieux, comprendre dans quel but la mulâtresse le lui avait lancé. Toutefois, elle dissimula sa joie et, s’appuyant au bras de Margarèthe, elle se dirigea lentement vers l’escalier des cabines.

Un instant plus tard, sans passer par le salon commun à tous les membres de la famille Fairtime, elle se glissait dans sa cabine, en disant à sa compagne, assez haut pour être entendue par un matelot qui parcourait les coursives.

— Le plein air m’a toute étourdie ; je crois que je vais dormir.

La fille de l’espion était demeurée dans le couloir. Il y avait dans cette réserve de l’humilité et de la délicatesse. Elle ne voulait pas s’immiscer dans les secrets de Miss Édith ; elle ne se croyait pas digne de les partager.

Et puis là, gardant la porte, elle empêcherait qu’on surprît la jeune fille.

Tout à coup, Margarèthe perçut comme un cri étouffé.

Ce cri partait de la cabine d’Édith. Sans réfléchir, elle ouvrit et s’arrêta stupéfaite sur le seuil. La jeune Anglaise debout, transfigurée, extatique, les bras étendus en croix, le journal tremblant dans sa main, semblait figée en une invocation adorante.

Sur la feuille, Marga lut ce titre : Hamburger Tagblatt. Le journal était allemand !

Et comme elle demeurait sans mouvement, cherchant une raison plausible à l’apparition de ce papier allemand a la Havane, ville espagnole de mœurs et de langage, les regards bleus de Miss Édith se portèrent sur elle.

Alors, tout l’être de la jeune fille parut fléchir. Elle s’abattit presque dans les bras de Margarèthe, et pesant sur elle de tout son poids comme si elle était devenue subitement inapte à se soutenir, elle ferma les yeux demi-pâmée, trois mots jaillissant de son cœur :

— Il est vivant !

Étendre Édith sur la couchette de la cabine, verrouiller la porte, fut pour la fille de l’espion l’affaire d’une seconde. Puis elle revint à Miss Fairtime, Celle-ci surmontait déjà sa faiblesse nerveuse. Elle avait rouvert les yeux, et, Margarèthe se penchant vers elle, lui demandant d’une voix tremblante la cause de sa soudaine défaillance, elle lui répondit, une joie divine vibrant dans son accent :