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Page:Ivoi - L’Aéroplane fantôme.djvu/359

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LE LIT DE DIAMANTS.

cette phrase, si claire en sa concision : Moi qui suis bien placé pour le savoir, je rends justice à la sagacité des rédacteurs du Hamburger Tagblatt.

Et cela était signé de ce nom : François.

— Eh bien ? questionna Édith, voyant que sa compagne demeurait sans voix, sans geste, comme absente.

Margarèthe balbutia :

On avait menti ?

— Oh ! qu’importe cela, pauvre sœur attristée ; oublions cet on qui nous a rapprochées, qui nous a jetées dans les bras l’une de l’autre. Nous n’avons qu’un seul cœur ; on n’existe plus. Je voulais seulement dire : Ce journal que l’on me remet ici, à la Havane, prouve que nous y étions attendues.

— Ceci me paraît de toute évidence.

— Alors, on nous accompagne ; on veille sur nous, et c’est lui, lui, François. Il n’a pas voulu que je pusse conserver un doute. C’est lui qui a tracé cette approbation railleuse du publiciste hambourgeois.

— Vous reconnaissez l’écriture ?

— Oh ! oui ! c’est pourquoi je ne doute plus.

Dans un geste de tendresse, elle porta le journal à ses lèvres.

— Seulement, reprit Margarèthe, il faut que vos… ennemis ignorent que votre défenseur est sur leur trace. Il convient de montrer une excessive prudence. Je vais vous demander un grand sacrifice. Détruisez le journal qui vous apporte une si grande joie, afin que d’autres yeux ne le lisent pas.

La logique de la réflexion ne pouvait échapper à Édith douée de cet esprit de raison qui fait la force de la race saxonne. Une légère contraction des traits trahit seule l’effort qu’elle s’imposait pour se séparer des quelques mots tracés par la main François de l’Étoile.

— Le brûler, n’est-ce pas ? fit-elle d’une voix ferme.

— Oui, c’est le mieux, je l’ai souvent entendu dire dans un passé que je voudrais oublier.

Une allumette craqua, le quotidien froissé s’enflamma. Une minute après, il ne restait qu’un petit monceau de cendres, que les jeunes femmes recueillirent précieusement et jetèrent par pincées au dehors, à travers le hublot éclairant la cabine.

Puis le plancher fut copieusement arrosé de parfums, afin de dissimuler l’odeur caractéristique du papier brûlé, et Édith enlaçant Margarèthe :

— Chère sœur, voulez-vous demander à nos geôliers s’il nous est permis de remonter là-haut ?