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Page:Ivoi - L’Aéroplane fantôme.djvu/397

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LE LIT DE DIAMANTS.

la bande sablonneuse, qui abrite les lagunes contre les houles de la mer.

Elle flotte à présent sur des eaux calmes qu’à peine ride une brise légère. Elle file, laissant un sillage allongé, vers les falaises de la côte, que troue une cavité sombre dont les proportions grandissent à chaque coup de rame.

Margarèthe sent trembler sur son épaule la main de son amie. Elle devine ce qui se passe dans l’esprit d’Édith.

Dans quelques minutes, le canot touchera la côte, et les raisons de l’avis étrange donné à la jeune fille ne se révèlent pas. Est-ce qu’elle ignore, qu’elle attend avec la foi aveugle en une promesse faite au nom du fiancé, est contrecarré par les circonstances ? Est-ce que cela, ce cela inconnu n’aura pas lieu ?

Et brusquement, toutes deux demeurent saisies, figées dans un étonnement qui les paralyse, leurs pensées courant dans leurs têtes ainsi que des bêtes affolées.

Du ciel noir vient de jaillir un faisceau de lumière blanche, crue, aveuglante, qui s’est posé sur la barque, l’emprisonnant dans un disque éblouissant.

Les rameurs lâchent leurs avirons. Von Karch se dresse au milieu de l’embarcation.

Mais nul n’a le temps d’exprimer sa surprise. Dans le noir, au-dessus de leurs têtes passe un grondement étrange, surnaturel. On dirait un vent d’orage hurlant au fond des ténèbres.

Et puis une forme apparaît à l’arrière de la barque, fond sur elle.

Un cri d’épouvante jaillit de toutes les lèvres. Terreur intempestive. L’objet inexprimable a passé, personne n’a le moindre mal.

Seulement, Édith, tout à l’heure debout à l’arrière, n’est plus là. Elle a disparu dans l’obscurité, enlevée par l’inqualifiable assaillant.

Et à la même minute, Margarèthe penchée à l’oreille de Lord Fairtime, Von Karch frémissant de colère, murmurent les mêmes mots :

— C’est lui.

Oui, c’était lui qui, mettant à profit les renseignements fournis par le portefeuille de Brumsen, venait d’arracher sa fiancée à son terrible adversaire.

Édith l’apprenait à cette heure. Étendue au fond de l’aéroplane, elle écoutait François qui, agenouillé auprès d’elle, lui parlait doucement.

— Pardonnez-moi, pardonnez-moi la peur que j’ai dû vous causer ; l’heure était grave. Si je n’agissais, le misérable Von Karch vous entraînait dans un