Aller au contenu

Page:Ivoi - La Mort de l’Aigle.djvu/366

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Sur la Loire.

Une seconde l’Empereur semble chanceler sous ce flot de nouvelles désastreuses ; mais il se remet et avec un calme qui étonne les assistants, il reprend l’entretien là où il l’a laissé :

— Sur la Loire, dites-vous ? De qui vient cette résolution ?

— Sire, on prétend que vous aviez donné l’ordre…

— Cela n’est pas, mais Joseph, Clarke, Marmont, Mortier, que sont-ils devenus ? Qu’ont-ils fait ?

— Nous n’avons vu ni Joseph ni Clarke de la journée. Quant à Marmont et à Mortier, ils se sont conduits en braves gens. Les troupes ont été admirables ; la garde nationale rivalisait avec les hauteurs de Belleville et leurs revers du côté de La Villette et aussi Montmartre… Ah ! Sire, si nous avions eu une réserve de 10.000 hommes, si vous aviez été là… Nous aurions sauvé Paris.

Ironiquement Napoléon murmura :

— Oui…, si j’avais été là !

Puis reprenant son interrogatoire :

— Mais Joseph, Clarke, où étaient-ils ? Mes deux cents bouches à feu de Vincennes, qu’en a-t-on fait ? Et mes braves Parisiens, pourquoi ne s’est-on pas servi d’eux ?

Belliard étendit les bras en un geste vague :

— Je ne sais rien, Sire. Nous étions seuls et nous avons fait de notre mieux. Nous avons mis au moins 12.000 ennemis hors de combat.

Un silence, après lequel l’Empereur, d’une voix assourdie, comme couverte d’un voile, prononça :

— Je devais m’y attendre. Joseph a perdu l’Espagne, il perd la France. Et Clarke ? Rovigo avait raison… Clarke est un lâche, un traître, un incapable…

Soudain son organe s’éclaircit, et relevant la tête qu’il avait courbée, prenant un accent d’irrésistible autorité :

— C’est assez se plaindre… Il faut réparer le mal, il en est temps encore… Caulaincourt, faites suivre la voiture.

Ce disant, il marchait vers les cavaliers arrêtés à quelque distance.

— En avant… mes braves, réoccupons Paris… C’est l’Empereur qui vous conduira une fois encore à la victoire.

— Vive l’Empereur, répondent les soldats électrisés !

Mais Belliard se précipite sur les pas de Napoléon, il supplie :

— Il est trop tard pour nous rendre à Paris. L’armée a dû le quitter