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Page:Ivoi - La Mort de l’Aigle.djvu/368

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— La maison de la poste à deux cents pas à peine, répond une voix.

— Bien. Caulaincourt, prenez mes cartes, elles sont dans la voiture,… et rejoignez-moi.

Puis appelant du geste Espérat qui le regarde, il ajoute :

— Viens ça…, c’est sur toi que Napoléon s’appuiera pour gagner son gîte.

Et la main sur l’épaule du jeune garçon, il se rend à la maison de poste. Le maître du logis, déjà réveillé par les allées et venues des troupes, met une chambre à la disposition de l’Empereur.

Celui-ci étale les cartes rapportées par de Caulaincourt, il les examine, réfléchit et parle :

— Si j’avais mon armée ici… tout serait réparé… Alexandre de Russie est vaniteux, il brûle de parader dans la grande cité parisienne… Demain sans doute, il y passera une revue et aura une partie de ses régiments sur la rive droite de la Seine ; l’autre sur la rive gauche… Si j’avais mon armée, je les écraserais tous ;… la grandeur de la France serait refaite… mais je ne l’aurai que dans trois ou quatre jours.

— L’armée viendra, insinua Caulaincourt, et dans quelques jours, Votre Majesté fera ce qu’elle ferait aujourd’hui.

Il n’acheva pas. L’Empereur lui avait saisi les mains ;

— Ah ! mon pauvre ami…, vous ne connaissez pas les hommes… Trois journées… deux même, vous ignorez ce que l’intrigue peut faire en un temps si court. Que de partisans je perdrai… je les connais, moi… je les nommerais tous… C’est un bonheur que l’Impératrice ait quitté Paris… c’est une enfant, on se serait servi d’elle contre moi et Dieu sait quels actes on lui aurait arrachés[1] !

Et marchant à grands pas dans la chambre.

— Sortez tous, dit-il enfin… sauf vous, Caulaincourt, sauf toi, Espérat.

  1. Ces paroles étaient prophétiques. La conduite ultérieure de Marie-Louise ne les justifia que trop.