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Page:Ivoi - Le Radium qui tue.djvu/158

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Le docteur Meulen ne dit rien, mais ses yeux semblaient approuver.

De fait, Mathiesel le soignait particulièrement, veillant à ce que son verre ne restât jamais vide…

Le repas achevé, la veuve et son hôte causèrent à bâtons rompus, puis, à neuf heures sonnant, ils se séparèrent pour s’enfermer chacun dans sa chambre. Mathiesel, elle, enferma les autres domestiques dans leurs cellules respectives, puis regagna la pièce où elle devait passer la dernière nuit de son séjour à Stone-Hill.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Dûment enfermé et verrouillé chez lui, le docteur Meulen avait allumé les trois lampes électriques éclairant sa chambre à coucher.

Puis tirant de sa poche une trousse de maroquin, il y prit une paire de ciseaux très pointus, une aiguille et du fil qui, singulière coïncidence, présentait une nuance identique à celle de la doublure de la sortie de bal toujours repliée sur le dossier du siège où l’avait posée Mathiesel.

Il attira le vêtement à lui, l’étala sur la table guéridon, et méthodiquement, maniant les ciseaux avec une habileté inattendue, il se prit à découdre l’ourlet inférieur. Les points, menus, ainsi qu’il convient à toute parure féminine sortant d’une maison qui se respecte, mirent sa patience à longue épreuve, mais sa patience fut plus longue que l’ourlet. Au bout d’une demi-heure, toute la partie inférieure du manteau béait, laissant apercevoir la soie blanche intermédiaire.

De même que les autres, ce vêtement présentait une triple épaisseur d’étoffe.

Un instant, Meulen demeura immobile, un sourire triomphant aux lèvres, dardant un regard profond sur la soie blanche mise à jour, chatoyante sous la clarté électrique.

— Voilà une correspondance qui aura donné du mal à son destinataire, fit-il d’un ton mi-badin, mi-grondeur. Mais bah ! Le succès efface tout.

Comme rappelé à lui-même par ces paroles, le docteur, écartant doublure et tissu gris, fit glisser au dehors une bande de soie blanche d’environ vingt-cinq centimètres de hauteur, et il la coupa dans toute l’ampleur de la sortie de bal. Alors, il brandit cette bande dans un geste de triomphe.