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Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/164

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la porte ! Pourquoi appelait-elle M. François Gravelotte son père ?

Une seconde, Oraï parut embarrassé, mais cela n’eut que la durée de l’éclair.

— Habitude américaine, répliqua-t-il d’un ton dégagé. Votre oncle lui avait offert l’hospitalité magnifique des colons de la région… Cela, son âge, ses cheveux blancs avaient incité miss Paterson à lui décerner le titre respectueux et reconnaissant de père. Voilà tout. Sur ce, bonsoir. J’espère ne plus vous rencontrer.

La porte se referma.

Dans le corridor empli d’obscurité, Albin était seul, deux sentiments contraires se disputant son esprit.

Certes, il avait joie à savoir que miss Paterson ne courait plus aucun danger, mais en même temps il se sentait navré d’être séparé d’elle à jamais.

Car les paroles du prêtre de M’Prahu sonnaient encore à son oreille, claires, nettes, impitoyables.

La voie de la jeune fille, la sienne ne devaient plus se rencontrer. Cette constatation était désolante et logique.

Que pouvait-il y avoir de commun entre lui, Parisien ruiné, attaché à la libération de son oncle, condamné de par sa propre volonté à une captivité dorée à Sumatra, et la riche citoyenne des États-Unis, libre, honorée, à ce point que l’on n’avait pas cru pouvoir lui donner un cicérone moindre qu’un des prêtres les plus vénérés de la nation batta ?

À pas lents, il quitta l’aile droite, traversa le jardin, remonta s’enfermer dans sa chambre.

Il prit une chaise, s’assit devant sa croisée, et resta en contemplation devant la baie faiblement éclairée qu’il discernait en face de lui.

Il avait conscience d’avoir laissé là-bas une portion de son âme.

Mais le store abaissé ne lui permit pas de voir Oraï en grande conférence avec la nourrice Rana.

Le sacrificateur, une fois seul, avait réveillé la vieille Malaise, qui reposait dans une salle voisine.

Il l’avait informée de l’étrange visite d’Albin.

Et comme la fidèle servante se réjouissait de ce qu’elle considérait avec raison comme la preuve