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Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/191

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citude fraternelle. Ne pouvant deviner le rôle capital qu’un chiffon jouait, en cette journée, dans la vie de Gravelotte, il attribuait la stupeur de ce dernier à un léger coup de soleil, d’où inquiétude justifiée.

Après tout, il ne se trompait guère.

Albin avait un véritable coup de soleil ; seulement, il était intérieur.

La course des poneys, dans une atmosphère qui allait se rafraîchissant à l’approche du soir, et peut-être aussi la pensée que l’on rejoindrait les Américaines à l’étape, tirèrent peu à peu Gravelotte de son mutisme.

Il marchanda d’abord ses paroles, mais à mesure que l’heure avançait, il en devint moins économe, arrivant en fin de compte à la prodigalité.

— Pantenang ! clama le cocher, en désignant de son fouet une bourgade blottie au fond d’un vallonnement.

Albin s’arrêta net au milieu de la phrase commencée.

Ses yeux se fixèrent sur la petite agglomération.

En avant du bourg, le relais se distinguait à ce qu’il était surmonté du drapeau néerlandais.

Il se composait de plusieurs huttes de bambou, recouvertes de chaume de riz. Toutes étaient supportées par des pilotis, entre lesquels remises et écuries se trouvaient installées à claire-voie.

Albin découvrit ainsi une voiture semblable à celle qu’il occupait lui-même.

Dételée, les harnais accrochés au timon, des palefreniers indigènes la roulaient sous l’une des habitations.

— Elle est là, murmura le jeune homme.

Et s’adressant au cocher :

— Tes chevaux ne marchent pas.

Une nuance de surprise passa sur les traits du Malais ; mais le blanc avait parlé et un Javanais ne se reconnaît pas le droit de discuter avec la race victorieuse.

Le résultat de l’observation fut qu’une grêle de coups de fouet s’abattit sur les poneys, tandis que les échos d’alentour répétaient les glapissements encourageurs de l’automédon bronzé.