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Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/246

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— Vous voyez cette corbeille fleurie.

— Le centre formé de fleurs roses et le pourtour de fleurs rouges.

— Vous avez sous les yeux les deux variétés de Strehom-labou[1].

Albin, Morlaix échangèrent un regard et avec ensemble :

— Merci bien de la communication ; elle nous intéresse au dernier point.

Leur hôte les arrêta.

— Voilà ce que penserait un homme dénué de savoir ; mais le botaniste, lui, aura pour ces plantes une considération particulière. Le parfum des plus foncées provoque en effet le sommeil, celui des autres n’empêche point de veiller, et cependant l’odeur semble identique.

— Très curieux, murmura Albin, seulement je ne vois pas…

— Le parti que vous pourriez en tirer ?

— Je l’avoue.

— Je continue donc à professer. Vous m’accompagnez au jardin, vous cueillez quelques Strehom roses et inoffensifs. Vous y joignez deux strehom rouges. Ceux-ci, vous les offrez à vos adversaires ; par un raffinement de courtoisie vous les fixez à leur boutonnière. Un instant plus tard, ils connaissent le sommeil profond, propice aux conversations qu’ils doivent ignorer. L’expérience, de plus, vous sera comptée parmi les épreuves du savoir.

Décidément une protection incompréhensible s’épandait sur les Français. Cette réflexion traversant leurs cerveaux ne diminua en rien leur gratitude à l’endroit de l’aimable résident.

Mais celui-ci coupa court à leurs effusions.

— Agissez, messieurs, agissez. Les paroles ne sont que du vent ; l’action seule amène la réalité des faits.

Agir… Mais les voyageurs ne demandaient que cela.

Dix minutes s’étaient à peine, écoulées qu’ils sor-

  1. Autrefois, lors du trépas d’un Sultan, ses épouses, ses serviteurs préférés se donnaient la mort en s’enfermant dans une salle avec des brassées de Strehom-labou rouge. Une seule fleur à la boutonnière agit en narcotique, plusieurs deviendraient dangereuses pour la vie.