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Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/362

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À peine eut-elle jeté un regard au dehors qu’elle se sentit trembler des pieds à la tête. Le pic Bagac apparaissait en face d’elle, et, de son sommet aux roches rougeâtres, un filet de fumée bleuâtre fusait vers le ciel.

Le signal ! Le signal ! C’était donc ce matin qu’il lui fallait se rendre à Orion, qu’elle rencontrerait Antonio, qu’elle pourrait enfin savoir de lui, avec certitude, quel avait été le sort de son cousin Albin Gravelotte !

Elle n’hésita pas. Seulement, elle demeura quelques minutes immobile, contraignant son cœur à apaiser ses contractions désordonnées, son sang à reprendre un cours normal.

Il ne fallait pas que la fidèle Rana soupçonnât le but de sa sortie matinale ; sans cela la vieille nourrice s’y fût opposée de tout son pouvoir.

Lentement, la jeune fille s’habilla, jeta une espagnole (sorte de fichu de dentelle) sur ses cheveux noirs et quitta sa chambre.

Dans la pièce voisine, Rana se tenait prête à répondre au premier appel de sa maîtresse.

— Où vas-tu, Rayon d’or du Soleil ?

Daalia faillit s’irriter de la question, mais elle se maîtrisa. D’un ton indifférent :

— Je vais faire le tour de la redoute, dit-elle. Je me sens tout engourdie, ce matin.

Elle paraissait si calme, que la Soumhadryenne n’eut aucun soupçon. Elle salua et laissa passer la jeune fille.

Un instant plus tard, celle-ci était dans la cour. Des soldats passaient, vaquant aux corvées usuelles. À une croisée, un grand volontaire du Kentucky, tout en fourbissant son équipement, chantait une letnte mélopée indienne :

Où vas-tu, squaw timide ?
Ton pas léger ne laisse sur le sol
Pas plus de trace que le vol
De la colombe rapide.
Je vois. Sous la forêt, au feuillage touffu,
Tu suis le sentier de la guerre…
— Non, dans l’herbe du sentier moussu,
Je cherche la trace éphémère
Du guerrier Irabu,
Le plus vaillant
Combattant
De ma tribu.