Aller au contenu

Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/117

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

fédération du Nord-Américain. C’est ainsi que je reçus l’hospitalité au fort Davis.

Scipion s’inclina poliment. Où son interlocuteur voulait-il en venir ?

Celui-ci continua :

— Avant d’aller plus loin, me permettez-vous de vous adresser une question ?

— Adressez, je vous prie, adresser… Je verrai si j’y puis répondre.

— Oh ! sans crainte, monsieur, sans crainte. Mon interrogation portera sur un point de morale générale, sur… comment dirai-je ?… Un cas de conscience impersonnel.

— Dioubiban, s’exclama le bouillant Marseillais, vous me prenez pour un professeur de philosophie… Ma conscience, à moi, me dit : Fais ce que dois, advienne que pourra… et voilà toute ma morale.

— Elle m’encourage, monsieur, elle m’encourage, reprit Bell avec un sourire satisfait, à preuve que je m’explique sans plus de retard.

Il marqua un temps et poursuivit :

— Êtes-vous d’avis, monsieur, qu’un homme, mis par le hasard au courant d’un crime projeté, devient complice des criminels s’il ne cherche pas à déjouer leurs projets ?

Dans la loyauté de son cœur, Scipion répliqua sans hésiter :

— Naturellement.

Il n’avait pas achevé que Bell lui saisissait la main et la secouant avec une raideur toute britannique :

— À la bonne heure donc, c’est carré, cela ; j’aime les gens carrés. Nous allons nous entendre.

— Mais enfin de quoi s’agit-il ?

— D’un assassinat…

— D’un…

— Que l’on veut colorer des semblants d’un accident.

— Et qu’est-ce que j’y puis, moi ?

— Tout… ou rien, à votre choix.

Les deux hommes s’étaient levés. Leurs regards se rivaient l’un sur l’autre. Aucun ne baissa les yeux. Enfin Massiliague rompit le silence :

— Je vous écoute, sir Bell.

— Et je vous en suis très obligé, monsieur, vraiment, car mon cœur va se décharger d’un secret dont il était affreusement gonflé.