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Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/175

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ne pouvait comprendre les beautés de la langue marseillaise, il reprit, employant cette fois le jargon espagnol adopté par les tribus de la prairie :

— Vous êtes sauvé, señor Indien.

Le Séminole s’inclina avec grâce :

— Cœur de Feu sera l’ami du Visage Pâle qui a conservé un guerrier à sa tribu.

— Séminole, n’est-ce pas ?

— Mon frère l’a reconnu, fit le jeune chef avec une expression d’orgueil.

— Dioubiban, je crois bien, s’exclama Scipion avec un magnifique aplomb. On ne confond pas un noble Séminole avec ces chiens de Comanches. Mais je me demande comment l’écume de la prairie a pu vaincre le chef aux plumes de flamant.

Massiliague avait lu Gustave Aimard, Chevalier, Gabriel Ferry et employait ce qu’il croyait être la rhétorique indienne.

Son interlocuteur le considéra un instant avec surprise, puis doucement :

— Le guerrier blanc parcourt la prairie pour la première fois ?

— Vous l’avez dit, chef. Et même, puisque vous êtes un Séminole hospitalier, vous ne refuserez pas de m’indiquer mon chemin.

— Cœur de Feu guiderait lui-même son ami, s’il n’était rappelé par un devoir à son wigwam. Où allez-vous ?

À cette question précise, Scipion répliqua inconsidérément :

— Je n’en sais rien, pécaïre !

Mais remarquant l’effet produit sur son auditeur par cette réponse :

— Té, expliqua-t-il, je cherche des compagnons dont j’ai été violemment séparé… et je pensais que peut-être vous auriez entendu parler d’eux ?…

— Quels sont-ils ?

— C’est la Vierge du Mexique et son escorte.

Massiliague, on le voit, obéissant à une inspiration soudaine, désignait Dolorès Pacheco sous le surnom que lui avaient donné les Mexicains. Il ne regretta point de s’être exprimé ainsi.

Le Séminole hocha la tête :

— Mon frère n’est point un guerrier du Nord.

— Non, mon bon, fichtre non.

— Il prête l’appui de son bras à l’Indien désarmé.