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Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/205

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Lui, frissonne à ces mots. Il attend que le sommeil ait ramené le silence dans le camp. Deux heures… c’est son tour de garde, il va prendre place au bord du plateau supérieur.

Vingt minutes, il reste immobile, ainsi qu’une statue, semblant observer la plaine, puis il promène un regard curieux sur le camp.

Les tentes coniques ont des blancheurs de neige sous le soleil, pas un souffle dans l’air lourd qu’on dirait vomi par la gueule d’un four.

Blancs, créoles ou Mayos, vaincus par cette température étouffante, dorment profondément.

Alors, le Canadien se rapproche des chevaux, des mules, parqués à une extrémité de l’étroit plateau que domine le camp. Il procède par mouvements insensibles ; si quelqu’un le surveillait, il ne s’apercevrait pas de son déplacement, tant sa progression est lente, tant il met de prudence dans ses déplacements successifs.

Le voici près des bêtes.

Elles sont couchées, écrasées elles aussi par la chaleur. Tantôt l’une, tantôt l’autre, se dresse avec effort et va boire dans un creux de rocher, que les Mayos ont rempli d’eau.

C’est ce rocher qui parait être le but du chasseur.

Il y arrive.

Ses mains s’enfoncent dans ses poches, s’étendent au-dessus de la surface liquide.

Une poussière blanche s’en échappe, grésille légèrement en touchant l’eau, qui reprend aussitôt sa transparence.

Gairon exhale un soupir satisfait :

— La moelle séchée de la liane minura empêchera le départ de la caravane. Un jour de gagné. Si besoin en est, nous recommencerons demain.

Et avec les mêmes précautions, il regagne son poste.

À présent, ses yeux ne quittent plus les quadrupèdes. La plus forte chaleur est passée, le soleil descendant vers l’horizon darde ses rayons, à chaque instant plus Obliques.

Les animaux semblent se ranimer. Plusieurs vont boire.

Francis les compte avec une satisfaction croissante :

— Trois, sept, huit, dix…, quatorze…, tout va bien…