Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/221

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Bientôt il foula le sol calciné de la plaine.

Il avait été aperçu sans aucun doute, mais les Indiens n’en faisaient rien voir.

Ils continuaient à vaquer à leurs occupations comme si rien d’anormal ne se produisait.

— Les chiens, grommela Francis, ils vont obliger un honnête chasseur à leur adresser la parole de même qu’un solliciteur !

Il s’arrêta et avec un soupir :

— Un honnête chasseur, répétait-il… Suis-je honnête alors que je me débats dans les mailles d’un double engagement ? Je ne puis tenir l’un qu’en sacrifiant l’autre. Suis-je honnête ? Qui éclairera ma conscience ?

Cependant il allait toujours.

Maintenant il avait atteint la ligne occupée par les factionnaires de l’ennemi.

Peints en guerre, la mèche du scalp ornée des plumes distinctives des tribus, les Peaux-Rouges se laissèrent passer, demeurant debout, immobiles, le talon de leurs lances fiché en terre.

— Allons, murmura encore Gairon, les coquins savent bien n’avoir rien à craindre d’un chasseur privé de sa carabine.

À quelque distance, une tente rayée élevait son cône au-dessus de la surface de la prairie.

Le Canadien se dirigea de ce côté. L’entrée du léger monument d’étoffe était ouverte face au campement des assiégés.

En approchant, Francis se rendit compte que la tente était remplie de guerriers assis en cercle sur des pierres.

— L’assemblée des chefs, maugréa-t-il… Ces coyotes immondes m’attendent avec tout l’apparat dont ils sont capables.

Mais secouant les épaules, avec le mouvement maussade de l’homme qu’écrase un trop lourd fardeau :

— Allons. Gairon, il s’agit de leur parler.

Puis soudain, comme frappé :

— Il y aurait bien une solution… Si j’étais mort, je ne pourrais plus trahir la Mestiza au profit de Sullivan… et elle continuerait son voyage sans crainte.

Un brouillard humide obscurcit un instant ses yeux :