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Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/352

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Son cœur sautait dans sa poitrine en contractions éperdues.

Le Gorgerin, le but de son expédition, le gage de l’indépendance sudiste… Ses amis l’avaient en leur pouvoir.

Une tristesse voila un instant son regard :

— C’est la liberté pour tous… c’est la mort pour moi ! murmura doucement la jeune fille.

Mais d’un mouvement de tête mutin, elle parut chasser, la pensée importune, et le ton décidé :

— Qu’importe ! Quand j’ai quitté le Pérou, j’avais promis. J’ai prié pour obtenir le terrible bonheur de délivrer mes frères…

Elle eut une hésitation encore ; plus bas, elle reprit :

— Je ne savais pas, alors… mon cœur dormait… tandis que maintenant…

Un geste rageur coupa la phrase.

— J’ai juré, termina-t-elle avec énergie, j’ai juré. À toute cause sainte, il faut un martyr. Pour faire germer la liberté, il faut du sang.

Et joignant les mains :

— Prenez le mien.

Quelques minutes, elle resta immobile, les yeux levés vers le ciel. Elle reprit le papier et relut pour la seconde fois ces lignes :

« Le seigneur Cigale et Fabian Rosales, les moins connus de ceux qui ont intérêt à vous garder, se sont déguisés en colporteurs. Comme tels, ils vont se présenter au fort si ces lignes vous parviennent, c’est qu’ils auront réussi à tromper vos geôliers… »

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Minuit.

Lasse de réfléchir, la Mestiza s’était jetée toute habillée sur sa couchette.

Un demi-sommeil obscurcissait sa vue, rendait confuses ses pensées. Soudain, elle frissonna. Ses yeux s’ouvrirent démesurément, et appuyée sur le coude, la tête penchée, elle écouta.

Il lui semblait que des pas légers retentissaient dans le couloir sur lequel s’ouvrait la porte de sa cellule. Elle ne se trompait point.

Le bruit cessa ; un imperceptible cliquetis métallique se produisit, et la prisonnière perçut le glissement d’une clef introduite avec précaution dans la serrure.