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Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/385

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Six cavaliers étaient là. Six cavaliers bien armés, mais à la tenue correcte et soignée.

Plus de doute, un noble voyageur honorait le tambo de sa présence.

Déjà, l’un des « clients » avait mis pied à terre et tenait l’étrier à celui qui paraissait être le chef.

Gonfaccio courut à ce dernier. Retirant le bonnet de coton crasseux qui couvrait son chef, il s’inclina profondément.

— Les saints archanges bénissent le seigneur étranger ! Ma maison et moi-même sommes à lui.

— Bon, répliqua l’inconnu avec un accent saxon prononcé, je puis payer cher, je suis donc sûr que tu me seras dévoué.

Les yeux du tambero brillèrent comme des escarboucles. Dans la phrase impertinente de son interlocuteur, il n’avait entendu que ces mots :

— Je puis payer cher.

L’homme, cependant, descendit de cheval, jeta la bride à son domestique, toujours penché sur l’étrier, et, s’adressant à Gonfaccio :

— Suis-moi.

— Au bout du monde, s’il le faut, señor.

— Nous n’irons pas si loin, entrons seulement chez toi.

Et tandis que ses compagnons se dirigeaient vers un hangar branlant, décoré du nom d’écurie, le señor pénétra dans la cassine.

Des tables grossières, des bancs boiteux s’alignaient sur le sol, couvert de carreaux de terre, disjoints, fendus, et dont la couleur, jadis rouge, était devenue indécise.

Le voyageur s’assit, promena autour de lui un regard curieux, avança dédaigneusement les lèvres, puis :

— Donne des ordres pour que mes compagnons et moi puissions souper, sinon bien, du moins de façon convenable.

— À l’instant, señor, gibier, œufs, volaille… le tout arrosé d’un certain vin de France que je réserve pour les hôtes d’importance.

— C’est bien, va.

Aussi vite que le lui permettaient ses jambes courtes, le tambero quitta la salle.

Des vociférations, des bruits de casseroles maniées avec précipitation parvinrent jusqu’au voyageur,