Aller au contenu

Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/80

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

En effet, les Canadiens, droits en selle, descendaient la berge opposée, faisaient entrer leurs chevaux dans le lit du Rio Grande, et, suivant les sinuosités du gué, se dirigeaient vers la troupe de la Mestiza.

Celle-ci eut un mouvement. Un instant, on eût pu croire qu’elle allait pousser son cheval à la rencontre des chasseurs ; mais Rosales retint l’animal par la bride :

— Attendez donc, dit-il doucement.

Francis et Pierre approchaient rapidement. Sur leurs visages, que l’on distinguait à présent, se lisaient la tristesse, l’embarras.

À quelques pas, Gairon porta la main à son sombrero et s’adressant à Cigale :

— Je vous demande pardon, señor, si je ne vous ai pas pris à l’aube, comme cela était convenu. Votre présence ici me dit que vous savez ce qui est arrivé… Vous comprenez donc que le plus pressé était de suivre l’homme en danger.

— Vous avez sagement agi, commença le Parisien.

Mais la Mestiza l’interrompit, son anxiété ne lui permettant pas de patienter plus longtemps.

— Que savez-vous ?

Le Canadien s’inclina derechef et dirigeant son cheval sur le terrain à sec :

— Mon engagé et moi nous dormions encore ce matin, quand un bruit de voix, puis le galop précipité d’une troupe de chevaux nous réveillèrent en sursaut. Au désert on est curieux… tout ce qui ne s’explique pas pouvant contenir un danger. D’un coup d’œil, nous nous comprîmes, et avec précaution nous explorâmes le bois. En un point voisin de la lisière, une courte lutte avait eu lieu. Un homme était venu de l’hacienda, en compagnie d’un autre, et là, il avait été assailli par des gens embusqués.

Le Puma écoutait comme les autres, hochant la tête d’un air approbateur :

— J’ai vu ces choses, murmura-t-il.

— Ah ! c’est vous, chef, s’écria Francis, qui avez conduit la señorita jusqu’au fleuve. Alors vous devinez notre raisonnement. Un homme, hôte de l’hacienda, les traces de chaussures ne permettaient pas de supposer qu’elles appartenaient à un peone… Un hôte donc avait été surpris, enlevé. Il importait avant tout de savoir qui avait commis le rapt et dans quel but on agissait. Nos chevaux étaient remisés