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Page:Ivoi - Millionnaire malgré lui.djvu/308

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LE PRINCE VIRGULE.

— Bell est assez raisonnable pour qu’on le croie. À quoi bon le faire pleurer ? c’est une cruauté inutile.

Le chef de train intervint.

Le pauvre homme courait de voiture en voiture. Partout la nouvelle s’était répandue avec la rapidité de la foudre, commentée, amplifiée, enguirlandée, métamorphosée.

Partout des querelles. Partout des gens qui se regardaient avec défiance. Les bagages à main, déposés dans les filets, étaient vivement repris par leurs propriétaires.

C’était pitié de voir tant d’obèses voyageurs ou de frêles voyageuses étouffer sous des piles de valises, de couvertures, de cartons, de cannes, de parapluies, qui ne leur semblaient plus à l’abri des voleurs qu’empilés sur les genoux de ces touristes infortunés.

Pendant ce temps, Dodekhan, mettant à profit l’isolement où le laissait avec ses compagnons l’exode dans le couloir de la ménagerie Batby, parlait bas avec animation.

— Mes amis, je ne vois qu’un moyen de nous sauver.

— Vous en voyez un ?

— Oui, il demande de l’audace.

— Nous en aurons.

— De votre part surtout, mademoiselle Laura.

— Ah !

La jeune fille regarda Prince, puis avec fermeté :

— Je serai audacieuse autant que cela sera nécessaire. C’est ma liberté, c’est plus encore que je veux sauver.

De nouveau, ses yeux bleus se fixèrent sur Albert.

Le pseudo-Indien, alors, la voix baissée, expliqua son plan :

— À la première gare, la police envahira le train.

— Cela ne fait pas de doute.

— Bien ! Si la police nous arrête, Mlle Laura est perdue, elle retombe entre les mains d’Orsato…

— Cette fois, je le tuerai, gronda Albert, le visage contracté par une douloureuse colère.

— Et cela vous conduira en prison.

— Que faire alors ?

— Tromper la police.

— Mais comment ?

— Elle veut arrêter des voleurs… Fournissons-lui des voleurs.