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Page:Jacques Bainville - Louis II de Bavière.djvu/123

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suicide, et l’on a pu croire ensuite qu’il s’était noyé volontairement dans le lac de Starnberg. Mais ses tentatives mêmes prouvent que sa volonté n’était pas très ferme, puisqu’il se contenta de demander du poison à son valet de chambre, qui se garda bien de lui en fournir.

Il pensait, mais assez paresseusement, à un genre de mort plus romanesque, au moment précis où le Dr Gudden arrivait. Le roi avait annoncé son intention de se précipiter de la plus haute des tours de son château. Les domestiques prétextaient que l’escalier était fermé et qu’on ne retrouvait pas la clef, lorsque Gudden se présenta. Mis au courant de l’idée du roi, il s’empressa d’en tirer le parti qui s’offrait pour s’emparer sans violence de la personne de Louis II. Et il se réjouissait, professionnellement, de réussir aussi vite, de faire tomber le roi dans le piège vulgaire des infirmeries spéciales.

« Prévenez Sa Majesté que la clef est retrouvée », dit-il au valet de chambre.

Les deux médecins, les infirmiers, qu’on avait gantés de blanc par une attention assez burlesque, s’embusquèrent dans une galerie sombre qui conduisait à la tour. On ne tarda pas à entendre un pas ferme, et la stature imposante du roi parut. Déjà la quarantaine commençait d’alourdir le prince charmant. Les traits si fins, l’ovale délicat de son visage d’adolescent, se fondaient en une molle bouffissure. Mais l’éclat des yeux continuait à animer cette face blême encadrée de cheveux restés très noirs.

Aussitôt que le roi se fut approché de l’endroit où les médecins se tenaient dissimulés, les aides l’entourèrent, coupant sa retraite. Sur son mouvement instinctif de surprise, on lui saisit même les bras pour prévenir toute résistance. Louis II était prisonnier. Et Gudden le lui déclara sans ménagement