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Page:Jacques Bainville - Louis II de Bavière.djvu/125

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soit, d’exercer le pouvoir, une régence doit entrer en vigueur. Une année serait donc le terme le plus court, puisque la régence a été proclamée.

— Les choses pourraient bien aller plus vite. Il en sera de moi comme du sultan Mourad. Ce n’est pas très difficile de faire disparaître un homme.

— Sire, mon honneur me défend de répondre à de telles paroles », répliqua Gudden. Et là-dessus Louis brisa la conversation et demanda à rester seul. Quand on lui répondit que cela était impossible, qu’il serait désormais surveillé jour et nuit, le roi entra de nouveau dans une colère violente, mais qu’il parvint encore à maîtriser.

Il était tout à fait calme lorsqu’il monta, quelques heures plus tard, dans la voiture qui devait le conduire au château de Berg. Un cavalier se tenait à chaque portière c’était une sorte de retour de Varennes. Le roi se soumit à tout. Ses fidèles Tyroliens étaient rassemblés devant Neuschwanstein, tout prêts peut-être à porter encore secours à leur prince. Mais il ne leur adressa aucune parole, aucun appel, comme on l’avait craint un instant. Il se contenta de saluer la foule avec un sourire de résignation. En approchant du lac de Starnberg, il répondit en se découvrant aux ovations des paysans et des touristes. Au dernier relais, il descendit et but longuement de l’eau fraîche. Et c’est aujourd’hui une relique, montrée avec piété par l’aubergiste, que le verre où le roi rafraîchit ses lèvres ardentes. Dans tout ce Tyrol bavarois où Louis II avait passé tant d’années, ce misanthrope avait trouvé le moyen de se rendre populaire. Affable et mystérieux, cet ennemi des citadins avait conquis la montagne. Il aura eu le privilège d’obtenir à la fois le culte des esthètes dans les grandes villes, et celui des cœurs simples dans les hameaux tyroliens. Et son souvenir est resté si vivant que M. de