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Page:Jacques Bainville - Napoléon.djvu/233

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NAPOLÉON

français, pénétrant sur le sol badois, s’emparent, à Ettenheim, de la personne du prince et de ses papiers. Avant même de connaître ni les charges que ces documents peuvent contenir, ni les détails de l’arrestation, Bonaparte donne des ordres. Vincennes sera le lieu de détention. Le général Hulin, un jacobin, un pur, un des « vainqueurs de la Bastille », dont la carrière avait commencé le 14 juillet 1789, est désigné pour présider le tribunal. Dans la soirée du 17, Bonaparte a reçu le dossier de Strasbourg. Aucune preuve de complicité avec Cadoudal. Quant à Dumouriez, il y a méprise. Pourtant, le lendemain, Harel, commandant le fort de Vincennes, reçoit l’ordre de préparer un logement pour un prisonnier et de faire creuser une fosse. Le même jour, et à deux reprises, Joséphine implore vainement son mari. Il répond que les femmes n’ont pas à se mêler de ces sortes d’affaires, que « sa politique » exige ce coup d’État, que les royalistes l’ont trop compromis et que « cette action-ci » le dégage. Le 19, le dossier est envoyé à Réal avec la recommandation de ne souffler mot du « plus ou moins de charges » qu’il contient, tandis que Hulin, Murat, gouverneur de Paris, et Savary, colonel de la gendarmerie d’élite, convoqués à la Malmaison, reçoivent directement les instructions du premier Consul. Le lendemain, Bonaparte vient aux Tuileries. Il dicte lui-même les termes de l’arrêté qui institue la commission de jugement et qui énonce les chefs d’accusation, lesquels entraînent la peine capitale. Réal reçoit l’ordre de se rendre à Vincennes pour « conduire » l’interrogatoire et le réquisitoire et donner « une suite rapide » à la procédure. Ainsi les précautions sont prises. Hulin et Savary d’une part sont informés des volontés du premier Consul, comme Réal l’est de l’autre. Murat, non sans répugnance, mais obéissant à son impérieux beau-frère, nomme les membres du tribunal chargé de juger le prévenu « sans désemparer ». Rentré à Malmaison, Bona-