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LE REDRESSEMENT DE WAGRAM

Armée, coupée en deux, perd sa forte unité. « Que n’ai‑je eu ici les trois corps de Soult, Ney, Mortier ! » Ce sera le regret, le soupir de l’empereur après les dures journées d’Essling et de Wagram. Il n’est pas besoin d’être militaire pour pressentir que, dans cette campagne, Soult, Ney, Mortier manqueront.

L’inquiétude publique, Napoléon la devine si bien que son mot d’ordre, celui qu’il donne depuis Valladolid, c’est que la guerre n’est pas en vue, qu’il n’y a pas de présomption de guerre. Puis il faut avouer, se rendre à l’évidence. Cette guerre ne peut pas être évitée, l’Autriche la veut, elle a créé et mobilisé une landwehr, mis sur pied jusqu’à cinq cent mille hommes, un de ses plus gros efforts. Il est difficile de répondre de la Prusse, qui se laissera peut‑être entraîner par ses patriotes. Déjà des volontaires prussiens s’engagent dans l’armée autrichienne. Alors l’empereur rassure tout le monde, les Français et ceux qui sont menacés, en première ligne les rois, les princes de la Confédération du Rhin. Et comment rassure-t-il ? Par l’alliance russe. Il y croit encore ou il fait semblant d’y croire. Il écrit à tous que l’Autriche désarmera, qu’elle se tiendra en repos lorsqu’elle verra « les armées françaises et russes prêtes à envahir son territoire » dont les deux empereurs garantissent l’intégrité. Pendant tout le mois de mars, il répète la même formule, il fait savoir à Munich, à Stuttgart, partout, que le tsar est indigné de la conduite de l’Autriche, qu’il a réitéré sa promesse d’unir ses forces à celles de la France, que ses troupes sont en marche, qu’il se mettra lui-même à leur tête. Au vice-roi d’Italie, il recommande : « Vous devez inculquer de toutes les manières l’idée que les Russes marchent sur l’Autriche. »

Pour soutenir le moral, il donne aux autres une certitude qui lui manque, écoutant les observations sans impatience, comme chaque fois que les choses