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Page:Jacques Bainville - Napoléon.djvu/507

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NAPOLÉON

deen : « Considérez qu’enlever Anvers à la France, c’est, par-dessus tout autre objet, le plus essentiel aux intérêts britanniques. »

Ainsi la guerre, l’invasion prennent tout leur sens. À la fin de novembre 1813, la Hollande en révolte a rappelé le prince d’Orange. Les Alliés ont franchi le Rhin, violé la neutralité de la Suisse, en se couvrant du motif qu’ils n’en veulent qu’à la prépondérance de Napoléon. C’est la « feinte ». Un autre que Bonaparte l’a percée. Carnot, fier républicain, resté volontairement à l’écart de l’Empire triomphant, sort de sa retraite, offre ses services à l’empereur malheureux. Retour aux origines, aux causes-mères. Avec Carnot, le Comité de salut public reconnaît en Bonaparte son successeur. Et le « petit capitaine » se souvient. Carnot, principal artisan de l’annexion de la Belgique, est nommé sur‑le‑champ gouverneur d’Anvers. Voilà l’esprit de 1793. C’est à peu près le moment où Napoléon dit à Caulaincourt : « Veut-on réduire la France à ses anciennes limites ? C’est l’avilir. On se trompe si on croit que les malheurs de la guerre puissent faire désirer à la nation une telle paix. Il n’est pas un cœur français qui n’en sentît l’opprobre au bout de six mois et qui ne la reprochât au gouvernement assez lâche pour la signer. » Idée forte, arrêtée et ancienne. Peu de temps après son retour de Russie il avait déjà dit à Molé qu’il perdrait la confiance de « cette nation si lasse de la guerre » s’il lui procurait la paix à des conditions dont il eût « personnellement à rougir ». Il ajoutait : « Vous verriez les Français qui m’ont tant admiré, peut‑être tant craint, se moquer de moi plus qu’ils ne l’ont fait d’aucun de leurs gouvernements. »

Réduit à « la rigoureuse alternative de se soumettre à tout ou de tout risquer », il risquera tout. D’ailleurs, il reste le même homme, libre d’esprit, presque détaché de ces choses qu’il prépare avec le