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Page:Jacques Collin de Plancy - Dictionnaire infernal.pdf/247

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ÉNI
ENL
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ne put s’empêcher d’y joindre sa voix. Parcourant la basse Saxe, il prêchait, disait-il, comme il en avait reçu l’ordre d’en haut. Un jour qu’il racontait ses extases, il dit qu’il avait vu les âmes des bienheureux voltiger autour de lui, sous la forme d’étincelles, et que voulant se mêlera leur danse,


il avait pris le soleil d’une main et la lune de l’autre. Ces absurdités ne l’empêchèrent pas de faire des prosélytes parmi les réformés. Il a laissé divers volumes : 1o Véritable vue et histoire du ciel, Amsterdam, 1690, in-4o : c’est le récit de son excursion en enfer et en paradis ; 2o Mandat et ordre divin et céleste délivrés par la chancellerie céleste, Brème, 1625, in-4o ; cet écrit manque dans le recueil intitulé Œuvres, visions et révélations de Jean Engelbrecht, Amsterdam, 1680.

Énigme. On lit dans de vieilles histoires de Naples que, sous le règne de Robert Guiscard, on trouva une statue qui avait eu la tête dorée, et sur laquelle était écrit : Aux calendes de mai, quand le soleil se lèvera, j’aurai la tête toute d’or. Robert chercha longtemps à deviner le sens de cette énigme ; mais ni lui ni les savants de son royaume ne purent la résoudre. Un prisonnier de guerre sarasin promit de l’interpréter si on lui accordait la liberté sans rançon. Il avertit donc le prince d’observer aux premiers jours de mai l’ombre de la tête de la statue au lever du soleil, et de faire bêcher la terre à l’endroit où tomberait cette ombre. Robert suivit ce conseil et trouva de grands trésors, qui lui servirent dans ses guerres d’Italie. Il récompensa le Sarasin, non-seulement en lui accordant la liberté, mais en lui donnant de bonnes sommes.

Il y a beaucoup d’énigmes dans les divinations. On peut voir le traité des énigmes du père Ménestrier, de la compagnie de Jésus, intitulé la Philosophie des images énigmatiques, où il est traité des énigmes, hiéroglyphes, oracles, prophéties, sorts, divinations, loteries, talismans, songes, centuries de Nostradamus, et de la baguette. Lyon, 1694, in-12.

Enlèvement. Nous ne parlons ici que de ceux qui ont été enlevés par le diable. Une Allemande


avait contracté l’habitude de jurer et de dire des mots de corps de garde. Elle fut bientôt prise pour modèle par quelques femmes de son pays, et il fallut un exemple qui arrêtât le désordre. Un jour qu’elle prononçait avec énergie ces paroles qui sont tristes, surtout dans la bouche d’une femme : Que le diable m’emporte !… le diable arriva en hussard et l’emporta[1]. On lit en beaucoup de livres qu’un certain comte de Mâcon, homme violent et impie, exerçait une espèce de tyrannie contre les ecclésiastiques et contre ce qui leur appartenait, sans se mettre en peine de cacher ni de colorer ses violences. Un jour qu’il était assis dans son palais, bien accompagné, on y vit entrer un inconnu à cheval, qui s’avança jusqu’auprès du comte, et lui dit : — Suivez-moi, j’ai à vous parler : — Le comte suit l’étranger, entraîné par un pouvoir surnaturel. Lorsqu’il ar-

  1. Wierus, De prœst. dœm., lib. II ; Bodin, Démonomanie, liv. III, ch. i.