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Page:Jacques Collin de Plancy - Dictionnaire infernal.pdf/700

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n’a plus vu que le soleil jaune. Peu après s’est apparue une nuée noire de la forme d’une boule, laquelle a tiré tout droit contre le soleil et l’a couvert au milieu, de sorte qu’on n’a vu qu’un grand cercle jaune à l’entour. Le soleil ainsi couvert, est apparue une autre nuée noire, laquelle a combattu avec lui, et l’un a couvert l’autre plusieurs fois, tant que le soleil est retourné à ladite première couleur jaunâtre. Un peu après est apparue derechef une nuée longue comme un bras, venant du côté du soleil couchant, laquelle S’est arrêtée près dudit soleil. De cette nuée est sorti un grand nombre de gens habillés de noir et armés comme gens de guerre, à pied et à cheval, marchant en rang, lesquels ont passé tout bellement par dedans ce soleil vers l’Orient, et cette troupe a été suivie derrière d’un grand et puissant homme beaucoup plus haut que les autres. Après que cette troupe a été passée, le soleil s’est un peu obscurci, mais a gardé sa clarté naturelle et a été couvert de sang, en sorte que le ciel et la terre se sont montrés tout rouges, parce que sont sorties du ciel plusieurs nuées sanglantes et s’en sont retournées par-dessus, et ont tiré du côté de l’Orient, tout ainsi qu’avait fait avant la gendarmerie. Beaucoup de nuées noires se sont montrées autour du soleil, comme c’est coutume quand il y a grande tempête, et bientôt après sont sorties du soleil d’autres nuées sanglantes et ardentes ou jaunes comme du safran. De ces nuées sont parties des réverbérations semblables à de grands chapeaux hauts et larges, et s’est montrée toute la terre, jaune et sanglante, couverte de grands chapeaux, lesquels avaient diverses couleurs, rouge, bleu, vert, et la plupart noirs ; ensuite il a fait un brouillard et comme une pluie de sang, dont non-seulement le ciel, mais encore la terre et tous les habillements d’hommes se sont montrés sanglants et jaunâtres. Cela a duré jusqu’à ce que le soleil eut repris sa clarté naturelle, ce qui n’est arrivé qu’à dix heures du matin.

» Il est aisé de penser ce que signifie ce prodige : ceci n’est autre chose que menaces, » dit l’auteur. — Quant à nous, comme il n’y a dans le pays d’Altorff aucun témoignage qui appuie ce merveilleux récit, nous n’y verrons qu’un puff du dix-septième siècle.

Signe merveilleux apparu en forme de procession, arrivé près la ville de Bellac, en Limousin. Imprimé à Paris en 1621.

« Il n’y a personne qui, ayant été vers la ville de Bellac, en Limousin, n’ait passé par une grande et très-spacieuse plaine nullement habitée. Or en icelle, quantité de gens dignes de foi et croyance, même le sieur Jacques Rondeau, marchand tanneur de la ville de Montmorillon, le curé d’Isgre, Pierre Ribonneau, Mathurin Cognac, marchand de bois, demeurant en la ville de Chanvigné, étant tous de même compagnie, m’ont assuré avoir vu ce que je vous écris : 1° trois hommes vêtus de noir, inconnus de tous les regardants, tenant chacun une croix à la main ; 2° après eux marchait une troupe de jeunes filles, vêtues de longs manteaux de toile blanche, ayant les pieds et les jambes nus, portant des chapeaux de fleurs, desquels pendaient jusques aux talons de grandes bandes de toile d’argent, tenant en leur main gauche quelques rameaux et de la droite un vase de faïence d’où sortait de la fumée ; 3° marchait après celles-ci une dame accoutrée en deuil, vêtue d’une longue robe noire qui traînait fort longue sur la terre, laquelle robe était semée de cœurs percés de flèches, de larmes et de flammes de satin blanc, et ses cheveux épars sur ses vêtements ; elle tenait en sa main comme une branche de cèdre, et ainsi vêtue cheminait toute triste ; 4° ensuite marchaient six petits enfants couverts de longues robes de taffetas vert, tout semé de flammes de Satin rouge et de gros flambeaux allumés, et leurs têtes couvertes de chapeaux de fleurs. Ceci n’est rien encore, il marchait après une foule de peuples vêtus de blanc et de noir, qui cheminaient deux à deux, ayant des bâtons blancs à la main. Au milieu de la troupe était comme une déesse, vêtue richement, portant une grande couronne de fleurs sur la tête, les bras retroussés, tenant en sa main une belle branche de cyprès, remplie de petits cristaux qui pendaient de tous côtés. À l’entour d’elle, il y avait comme des joueurs d’instruments, lesquels toutefois ne formaient aucune mélodie. À la suite de cette procession étaient huit grands hommes nus jusqu’à la ceinture, ayant le corps fort garni de poil, la barbe jusqu’à mi-corps et le reste couvert de peaux de chèvres, tenant en leurs mains de grosses masses ; et, comme tout furieux, suivaient la troupe de loin. La course de cette procession s’étendait tout le long de l’île, jusqu’à une autre île voisine, où tous ensemble s’évanouissaient lorsqu’on voulait en approcher pour les contempler Je vous prie, à quoi tend cette vision merveilleuse, vous autres qui savez ce que valent les choses ?… »

Nous transcrivons le naïf écrivain. Nous ajouterons que la mascarade qu’il raconte eut lieu à l’époque du roman de l’Astrée, et que c’était une société qui se divertissait à la manière des héros de Don Quichotte.

Grandes et merveilleuses choses advenues dans la ville de Besançon, par un tremblement de terre ; imprimé à Château-Salins, par maître Jacques Colombiers, 1564.

« Le troisième jour de décembre, environ neuf heures du matin, faisant un temps doux et un beau soleil, l’on vil en l’air une figure d’un homme de la hauteur d’environ neuf lances, qui dit trois fois : « Peuples, peuples, peuples, amendez-