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Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/392

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pour l’opposer à celui de communisme que nous appliquions à l’école de Marx et de Blanqui, on admettra que nous ayons quelque droit à l’employer et à le définir.

La scission à la Haye était entre communistes autoritaires ou partisans de l’État, d’un côté, et communistes non-autoritaires (ou collectivistes), partisans de la Fédération des Communes, de l’autre.

Il est très vrai que le débat est resté ouvert, dans le parti socialiste, entre l’État ouvrier et l’anarchie (synonyme peu exact et incomplet de collectivisme) ; mais les partisans de l’État ouvrier n’ont pas cessé, à nos yeux, d’être ce que nous avons toujours appelé et appelons encore des communistes autoritaires ; nous réservons le nom de collectivistes uniquement à ceux qui inscrivent sur leur programme la destruction de l’État.

Il n’y a point de collectivistes qui soient partisans de l’État ouvrier : ce serait une contradiction dans les termes. Qui dit collectiviste, selon notre définition, dit partisan de la libre fédération et de l’autonomie.

« Ne pouvons-nous, dit B. Malon en terminant la lettre qu’il nous adresse, discuter sur les matières qui nous intéressent sans tomber dans la dispute ? Nous ne vous avons pas attaqués, pourquoi nous attaquez-vous ? »

Malon n’a pas attaqué la Fédération jurassienne, c’est vrai, mais il avait présenté certains faits sous un jour inexact ; nous ne l’avons pas attaqué non plus, nous avons simplement rétabli la vérité.

Malon, vers la fin du travail envoyé par lui et Joseph Favre au meeting de Lausanne, avait dit ceci : Il existe une foule de services administratifs et répartitifs, tels que les bibliothèques, les postes, les télégraphes, les observatoires, les poids et mesures, etc., qui aujourd’hui sont confondus avec l’organisation politique, et qu’il importe, non d’abolir, mais de transformer ; le socialisme tend même à augmenter le nombre de ces services publics, dont beaucoup, il est vrai, seront communaux, mais dont d’autres doivent être régionaux, nationaux ou continentaux. Or, ajoute Malon, ceci admis, il y aura, lors d’une révolution sociale, à prendre d’autres mesures, qui sortent du programme anarchiste tel que l’entendent et l’observent les Jurassiens.

Que veut dire cette phrase pour tout lecteur non prévenu, sinon que Malon prétend que l’idée de services publics régionaux ou continentaux est étrangère au programme des Jurassiens ; que les Jurassiens, en vertu de leur programme, veulent abolir les bibliothèques, les postes, les télégraphes, les poids et mesures ? et que quiconque veut la conservation des bibliothèques, postes, télégraphes, etc., et le maintien et le développement des services régionaux et continentaux, n’est plus anarchiste (c’est-à-dire collectiviste) ?

Or, nous le demandons, en accordant l’hospitalité, dans l’organe officiel de la Fédération jurassienne, à cette étrange appréciation de ce que Malon prétend être notre programme, pouvions-nous laisser passer une pareille affirmation sans protester ? Notre devoir et notre droit était de relever l’erreur commise, et de ne pas nous laisser bénévolement attribuer de telles niaiseries. Qu’après cela Malon se soit fâché, nous le regrettons pour lui. Nous avons l’habitude de dire nettement notre pensée, et nous attendons, de ceux qui discutent avec nous, qu’ils sachent supporter la contradiction.