Aller au contenu

Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/472

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


« Le gouvernement italien, soupçonnant l’Internationale d’être l’instigatrice de toute cette agitation révolutionnaire, entreprit contre les membres de notre association une campagne de persécutions telle, qu’il devint nécessaire de transformer l’Internationale en organisation secrète. Une commission d’hommes de confiance[1] fut chargée de maintenir l’organisation et de faciliter les relations entre les groupes.

« Des hommes qui avaient été exclus de l’organisation secrète de l’Internationale[2] crurent le moment favorable pour essayer de se mettre à la tête du mouvement ouvrier, afin de l’exploiter à leur profit. Ces hommes eurent le triste courage de lancer des attaques et des insultes aux internationalistes qui étaient emprisonnés et persécutés de toute manière par le gouvernement.

« Mais depuis quelques mois, après le procès de Bologne, l’Association internationale a pu reprendre son action au grand jour, et tous ceux, mazziniens et autres, qui se croyaient les maîtres des forces populaires, ne tardèrent pas à être délaissés ; maintenant le nom de l’Internationale a rallié autour de lui toutes les forces révolutionnaires de l’Italie.

« La Congrès tenu dernièrement à Florence a pu donner une idée de la propagande socialiste faite en Italie. Dans toutes les régions se forment de nouvelles sections. Le Piémont, où l’Internationale n’avait jamais réussi précédemment à s’implanter, possède maintenant ses sections. A Gênes même, qui est le boulevard du mazzinianisme, une section vient d’être fondée. Le Congrès a reçu des communications de diverses localités avec lesquelles l’Internationale n’avait pas encore eu de rapports.

« Malatesta raconte ensuite les persécutions qui ont été dirigées contre les internationalistes à propos du Congrès de Florence... Mais ces sortes de persécutions n’ont jamais fait en Italie qu’avancer l’œuvre de la propagande socialiste révolutionnaire. »

Le rapport de la Fédération espagnole, lu par Sanchez [Viñas], occupe huit pages du Compte-rendu. Je ne l’analyserai pas ; la plupart des faits qu’il contient ont déjà été mentionnés à leur date. J’en extrais seulement deux passages, dont le premier indique la force numérique de la Fédération espagnole dans l’été de 1876 : « La fédération comarcale de Catalogne comprend 23 fédérations locales ; la fédération comarcale de Valencia, 10 fédérations locales ; celle de Murcie, 4 ; celle de l’Andalousie de l’Est, 21 ; celle de l’Andalousie de l’Ouest, aussi 21 ; celle de l’Estrémadure, 10 ; celle d’Aragon, 2 ; celle de Vieille-Castille, 7 ; celle de Nouvelle-Castille, 10 ; total, 112 fédérations locales. » Le second passage donne l’opinion des internationalistes espagnols sur les grèves et sur la coopération : « Les ouvriers d’Espagne, malgré la dictature qui les opprime, ont soutenu plusieurs grèves importantes... Celles des tonneliers et des teinturiers ont coûté à l’organisation corporative plus de 50,000 duros (250,000 francs) ; si ces ressources eussent été employées au développement de l’organisation révolutionnaire, on eût pu obtenir de grands et féconds résultats. Les tailleurs de pierre de Barcelone ont réussi à faire réduire à sept heures la journée de travail. La plus importante des grèves actuelles est celle des serruriers de Barcelone, qui absorbe 300 duros (1500 fr.) par semaine. Les ouvriers de fabriques (clases de vapor) gaspillent aussi en grèves presque toutes leurs ressources. Toutefois l’esprit gréviste perd du terrain, à mesure que l’esprit d’action révolutionnaire en gagne[3].

« Le système de coopération de production, si hautement préconisé par quelques socialistes, a produit des résultats funestes, en particulier pour la fédération des tonneliers. Les ateliers coopératifs ont doté cette fédération d’une douzaine de bourgeois nouveaux, et lui ont occasionné une perte de cinq à six mille duros (vingt-cinq à trente mille francs). En présence de cet échec,

  1. Le Comité italien pour la Révolution sociale.
  2. Lodovico Nabruzzi, Tito Zanardelli, etc.
  3. On voit que, dans la pensée des socialistes espagnols d’alors, la grève et la révolution s’opposaient l’une à l’autre, tandis que, pour les syndicalistes modernes, la grève est un acte révolutionnaire.