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Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/533

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geoises — qu’elle provienne d’une crasse ignorance ou d’une mauvaise foi voulue — a toujours été d’imputer à notre parti les tirades déclamatoires de quelques personnages d’ailleurs parfaitement inoffensifs, et de mettre dans le même sac les Sozial-Demokraten et les anarchistes, afin de discréditer aux yeux de nos concitoyens nos tendances, qui, de même que celles des Sozial-Demokraten d’Allemagne, n’ont absolument rien de commun avec les rêves creux des utopistes...

« En opposition à la doctrine anarchiste, qui veut supprimer non-seulement le mode actuel de production, mais encore l’État lui-même, l’école socialiste allemande — suivie en cela par les socialistes autrichiens, danois, hollandais, belges, anglais, américains, serbes, par une partie des socialistes russes, par une grande partie des socialistes français, et par la très grande majorité des socialistes suisses, tandis que la théorie anarchiste a ses adhérents principalement en Italie, en Espagne, en partie parmi les Russes, et dans le Jura suisse — l’école socialiste allemande, disons-nous, enseigne que l’idée du véritable État, de l’État populaire démocratique (des demokratischen Volksstaats), n’a jamais encore été réalisée jusqu’ici. L’État n’a pas seulement à remplir des fonctions de police, il n’a pas seulement à garantir l’ordre juridique extérieur, à faire le gendarme ; il a une mission plus élevée, morale, civilisatrice. L’État, en lui-même, n’est pas quelque chose qui nous soit hostile ; ce n’est pas, comme le prétend la triste école de Manchester, quelque chose qui soit en dehors de nous et à qui il faut demander de nous déranger le moins possible (laisser faire, laisser passer). Non, l’État est quelque chose de vivant, d’animé, l’État c’est nous-mêmes. La réalisation pratique de cette idée forme le programme des Sozial-Demokraten[1]. »

Le Bulletin, après avoir reproduit cette citation, ajouta ce qui suit :


Nous ne nous arrêterons pas à discuter, à cette place, cette définition, erronée à notre avis, de l’État et de son rôle social. Ce que nous voulons relever, c’est, de la part de citoyens que nous avons toujours traités en alliés, en Parteigenossen, pour employer le terme allemand, cette singulière façon de comprendre et de pratiquer la solidarité. Les mêmes hommes dont est censé émaner l’Appel que nous venons de citer étaient présents, si nous ne nous trompons, à cette réunion qui eut lieu à Berne il y a sept mois à l’occasion des funérailles de Bakounine, et dans laquelle, à l’unanimité, tout en réservant pour chacun l’entière liberté de ses théories, on vota l’oubli « des vaines et fâcheuses dissensions passées ». Aussi croyons-nous que les passages hostiles à la Fédération jurassienne expriment, non pas tant le sentiment des ouvriers de Berne qui appartiennent à l’Arbeiterbund, que les rancunes de quelques personnalités malveillantes, dont le métier semble être d’empêcher tout rapprochement entre des groupes qui devraient vivre en paix et s’entr’aider.


Enfin, dans son numéro du 18 mars, le Bulletin revenait encore sur cette question :

  1. Voilà, dans toute sa niaiserie, la conception des socialistes étatistes exposée par un Sozial-Demokrat authentique, — qui se croit disciple de Marx !