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Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/700

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gendarmes et des deux civils. En peu de jours, le produit de la souscription me permit de verser entre les mains de l’avocat la somme de 303 fr. 55 qui m’était réclamée. Quant aux autres bénéficiaires de l’arrêt du tribunal, je n’entendis pas parler d’eux.

Le nouveau Comité fédéral jurassien fut composé de Jules Lœtscher, graveur, à Sonvillier, secrétaire correspondant ; Joseph Lampert, graveur, à Sonvillier, secrétaire des séances ; Arnold Christen, cordonnier, à Saint-Imier, trésorier ; Henri Brætschi, monteur de boîtes, à Saint-Imier ; et Fritz Huguenin, graveur, à Sonvillier. Il tint sa première séance le 18 avril 1878. En mai, Lampert, ayant quitté Sonvillier, fut remplacé par Paul Courvoisier ; Arnold Christen le fut, quelques jours après, par J. Hoffmann. Le procès-verbal du 20 juin 1878, que j’ai sous les yeux, donne les indications suivantes relativement aux fonds qui avaient été recueillis à l’occasion des événements du 18 mars 1877 à Berne et du procès qui en avait été la conséquence :

Souscription pour les ouvriers de Berne renvoyés par leurs patrons à la suite de la manifestation du 18 mars.

Fonds recueillis. . . . . . . . . 291 fr. 80

Sommes distribuées . . . . . .168 » —

Solde en caisse. . . . . . . . . . . 123 fr. 80

Souscription en faveur des familles des condamnés du procès de Berne.

Fonds recueillis. . . . . . . . . . .615 fr. 30

Sommes distribuées. . . . . . .585 » 10

Solde en caisse. . . . . . . . . . . 30 fr. 20

Souscription pour couvrir les indemnités allouées aux quatre gendarmes et aux deux civils (s’élevant au total à 470 fr.).

Produit. . . . . . . . . . . . . . . . . 587 fr. 80

Dépenses. . . . . . . . . . . . . . . .303 » 55

Solde en caisse. . . . . . . . . . . 284 fr. 25


Cependant le mois d’avril arrivait à sa fin : il m’était impossible de différer plus longtemps mon départ pour Paris, sous peine, m’écrivait-on, de perdre le travail de compilation et de traduction dont j’avais été chargé par une maison d’édition. Je me décidai donc à aller m’assurer par moi-même si je pourrais séjourner en France sans être expulsé ou arrêté, et si, en outre, je trouverais dans le milieu parisien des moyens réguliers d’existence. Je partis, seul, le 1er mai 1878, le jour même de l’ouverture de l’Exposition universelle ; ma femme devait me rejoindre un peu plus tard avec notre enfant, si la situation, après examen, me paraissait tenable. Mes premières impressions, à Paris, furent optimistes : je n’y arrivais point fatigué et découragé, mais, au contraire, plein d’ardeur au travail et résolu à me consacrer à des recherches, qui m’attiraient depuis longtemps, sur l’histoire de l’instruction publique pendant la Révolution française. Le lendemain de mon arrivée, j’écrivais à ma femme (3 mai) : « Les mots me manquent pour t’exprimer combien Paris me plaît. Je suis sûr que toi aussi tu en seras dans le ravissement. Le ton, les manières, tout enfin m’agrée et me va au cœur. Je me sens dans ma vraie patrie. » Et quelques jours après : « Je t’écris de la Bibliothèque nationale, en attendant qu’on m’apporte les livres que j’ai demandés pour travailler... J’ai déjeuné au Palais-Royal, à deux pas ; et ensuite, en fumant ma cigarette dans le jardin, au milieu des fillettes qui jouaient, je pensais à la joie que la nôtre aurait à courir là, sous ces arbres, autour de ces pièces d’eau ; et je pensais aussi : c’est dans ce jardin qu’a commencé la Révolution française ; c’est monté sur une chaise comme celle sur laquelle je suis assis que Camille Desmoulins a appelé le peu-