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Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/99

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Notre Bulletin disait, dans son numéro du 1er juin, à propos du programme du Congrès d’Olten :


Il s’agit de centraliser l’action de la classe ouvrière ; de centraliser les institutions de secours mutuel et d’assurance ; de créer un organe central et un comité central.

Les délégués jurassiens, naturellement, ne pourront pas s’associer à des propositions semblables, entièrement opposées à leurs principes. Et voici, sur la question générale d’organisation ouvrière, ce qui nous semble devoir être mis en avant, au lieu des projets dont nous venons de parler.

La première question, la question vitale, c’est de pousser à la création de fédérations régionales du même métier. Il faudrait constituer une Fédération régionale suisse de toutes les sociétés de charpentiers, une autre de toutes les sociétés de cordonniers, et ainsi de suite. Dans plusieurs corps de métier, cette fédération est déjà commencée, dans d’autres elle est même un fait entièrement accompli.

Chacune de ces fédérations de métier aurait son administration entièrement à part, son comité fédéral à elle, son organe spécial à elle si ses ressources le lui permettent.

Mais cette organisation [régionale] par corps de métier [distincts] serait, à elle seule, insuffisante. Il faut, en outre, que les différents corps de métier soient mis en relation les uns avec les autres. Ce résultat s’obtient par la fédération locale des sociétés de métier, qu’on pourrait appeler aussi la Commune des travailleurs. Dans cette fédération locale, ou Commune, tous les corps de métier sont réunis, et ils s’y occupent, non plus des intérêts spéciaux de la corporation, mais des intérêts tant locaux que généraux du travail.

Les Communes, à leur tour, ne doivent pas rester isolées. Plusieurs fédérations locales ou Communes qui, soit par leur position géographique, soit par leurs besoins industriels, soit pour d’autres motifs, forment un groupe naturel, se fédèrent entre elles, et ainsi naît une Fédération de Communes. Cette Fédération de Communes se donne, elle aussi, un comité fédéral, et se crée un organe si elle en a besoin.

La Fédération jurassienne de l’Internationale, la Fédération romande et le groupe des Sections de langue allemande sont trois Fédérations de Communes.

Selon nous, l’organisation ouvrière doit s’en tenir là. Aller plus loin serait se jeter dans une centralisation funeste. Il n’est pas besoin de fondre les Fédérations de Communes dans une Association nationale unique, et de remplacer leurs divers Comités fédéraux et leurs divers journaux par un Comité central et un organe unique... Le système que nous recommandons a cet avantage immense de ne pas enlever la vie aux parties pour la jeter toute au centre ; de ne pas rendre inutile l’initiative des individus et des groupes locaux en la remplaçant par l’activité d’un Comité central ; enfin, de ne pas remettre entre les mains de quelques hommes toute l’administration de nos intérêts communs, car cette administration centrale et unique peut trop facilement devenir entre les mains des intrigants (il s’en trouve partout) un levier politique ou un moyen de satisfaire des ambitions personnelles.