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Page:Jammes - De l’Angélus de l’aube à l’Angélus du soir.djvu/274

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Mon âme grave se prosterna sur la grand-route.
Une espèce de chose religieuse et douce
nageait dans l’azur pur où peinaient les bœufs roux…

C’était comme un chant que l’on n’entend pas,
comme un mendiant d’hiver qui traîne ses pas
vers la paille d’auberge où la nuit l’endormira.

Ce jour-là, tout à coup, dans une grande tendresse,
le village, à genoux et triste, s’est montré
et, des acacias, il tombait des caresses.

Les canards, balançant leurs pieds, allaient aux mares.
Les vignes bleues couraient sous les fenêtres noires,
et l’on entendait, dans l’école communale,

le murmure d’abeilles que font les alphabets,
lorsque les enfants doux chantent l’A, B, C, D
devant les beaux tableaux de sciences utiles.

Sur les vieux seuils brisés où les vieillards filent,
du ciel bleu se posait comme près d’une rive
se pose le martin-pêcheur aux plumes vives.