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Page:Jammes - Feuilles dans le vent, 1914.djvu/252

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FEUILLES DANS LE VENT

comme un cri d’amour au passage de leur Dieu.

Le laurier qui, chaque année, sanctifie notre demeure est notre ami, lui dont le feuillage résiste aux assauts de l’hiver aussi bien qu’à ceux de la destinée. Il nous suit dès le berceau et jusques à la tombe. Qui ne connaît, hélas ! cette solennelle entrée dans la chambre d’un mort, quand les enfants sont à genoux et que, dans l’assiette emplie d’eau bénite, trempe le sombre rameau de la Foi ? Il est étrange que, ce rameau, certains s’efforcent de nous l’arracher, étrange qu’ils ne comprennent pas leur impuissance absolue à détruire, dans un mauvais rêve, ce qui ne peut être ni vu ni touché. Tant que grondera l’orage et que la douleur nous battra, nous serons cramponnés à ces palmes que les martyrs ne lâchèrent que pour les ressaisir dans leur sang. L’Esprit des ténèbres pourra bien un instant donner le change, enlever les rameaux bénits au mur hâlé de la chaumière agricole ou à la galerie où sèchent les filets de mer. Mais viendra le jour que l’intelligence des laboureurs et des marins comprendra la vanité de celle qui