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Page:Jammes - Feuilles dans le vent, 1914.djvu/287

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MÉDITATION SUR UNE GOUTTE DE ROSÉE

matinée limpide où elle demanda grâce à Dieu. Aucun mot ne saurait rendre la pureté passionnée de ces pétales jaunes d’où, lentement, coule une larme de rosée. Ah ! que je l’ai comprise, cette larme !

Ô jeune fille du siècle passé ! Te doutais-tu, lorsque dans le salon toujours ombreux tu laissas tomber cette larme, que je l’honorerais un jour ? Elle a été recueillie et rien n’a altéré son eau précieuse. Cette pierre brillante de ton cœur — sois en paix dans le sein de Dieu ! — a été déposée par des mains dignes et pieuses dans le coffre chinois du grand salon. Je la redemanderai parfois aux amis qui la conservent, ô toi qui as souffert peut-être de ce même mal dont je suis atteint, de cette impossible et muette passion que seules comprendraient tes contemporaines dans leur grâce éteinte et leur farouche pureté.