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Page:Jammes - Feuilles dans le vent, 1914.djvu/313

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téguy, fait son entrée, salue Mmes d’Anis et tante des Arbailles, tend la main à l’oncle Tom qui lui sourit.

Il a vingt-trois ans. Il est Basque par son père, et d’origine espagnole par sa mère qui avait nom d’Elgorriaga. Cette mère morte jeune, étourdie et charmante, Johannès l’avait assez connue pour l’évoquer parfois. Il croyait la revoir, fine comme la lame d’un poignard, s’exprimant avec volubilité au moment de se rendre à quelque bal. Sous la mantille ancienne, ses cheveux plus noirs que la nuit s’exhaussaient, embrasés par des camélias. Elle se penchait sur la couche de son petit garçon, le fixait de ce regard qui, de par la plus futile impression, devenait ardent jusqu’à la folie, et elle lui disait de sa voix rauque et douce, pareille à celle des clochers espagnols :

— Mon Johannès, tu seras plus raisonnable que moi ! Et elle riait. Et l’enfant, les yeux mi-clos, voyait la porte se rouvrir et sous les flambeaux que tenaient les femmes de cham-