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Page:Janin - Les catacombes, tome 5.djvu/173

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Puis il revint à moi.

— Vous avez bien fait de venir, me dit-il : j’étais bien triste. Il n’y a que la campagne qui me soit heureuse, la ville me tue ; j’étouffe ici ; j’entends toutes sortes de bruits étranges, mais moi je ne puis pas m’entendre chanter. C’est être bien misérable, n’est-ce pas ?

Et comme il me vit tout stupéfait :

— Oh ! dit-il les larmes aux yeux, c’est que je suis bien seul, tout seul ; personne ne me parle, personne ne demande ce que devient le pauvre vieux Beethoven ; moi-même je ne sais plus comment je m’appelle et qui je suis. Autrefois j’étais le maître d’un monde, je commandais au plus puissant orchestre invisible qui ait jamais rempli les airs ; je prêtais l’oreille nuit et jour à de ravissantes symphonies dont j’étais à la fois l’auteur, l’orchestre, le chanteur, le juge, le roi, le dieu ; ma vie était un concert perpétuel, une symphonie sans fin. En ce temps-là quelles ravissantes exta-